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Homélie de Benoît XVI au cours de la messe place de la Mangeoire

Bethléem, le 13 mai 2009
Source : vatican.va

Traduction de l’anglais par La Croix

***

Homélie

Chers Frères et Sœurs dans le Christ,

Je remercie le Dieu Tout-puissant de me donner la grâce de venir à Bethléem, non seulement pour vénérer le lieu de la naissance du Christ, mais aussi pour me tenir à vos côtés, chers frères et sœurs dans la foi qui vivez dans ces Territoires Palestiniens. Je suis reconnaissant au Patriarche Fouad Twal pour les sentiments qu’il a exprimés en votre nom, et je salue avec affection mes Frères Évêques et tous les prêtres, les personnes consacrées et les fidèles qui travaillent quotidiennement pour confirmer cette Église locale dans la foi, l’espérance et la charité. D’une façon particulière, mon cœur se tourne avec affection vers les pèlerins venant de la bande Gaza déchirée par la guerre : je vous demande de rapporter à vos familles et à vos communautés l’assurance que je les garde en mon cœur, leur partageant mes sentiments de tristesse pour les pertes que vous avez dû supporter, et ma solidarité dans la prière dans l’immense tâche de reconstruction à laquelle vous devez faire face et mes prières pour que l'embargo soit bientôt levé.

« Ne craignez pas, car voici que je viens vous annoncer une grande nouvelle, une grande joie (…) Aujourd’hui vous est né un Sauveur, dans la ville de David » (Lc 2, 10-11). Le message de la venue du Christ, porté depuis les cieux par la voix des anges, continue de résonner dans cette ville, tout comme il résonne dans les familles, les maisons et les communautés à travers le monde. C’est une « bonne nouvelle », disent les anges « pour tout le peuple ». Elle proclame que le Messie, le Fils de Dieu et le Fils de David est né « pour vous » : pour vous et pour moi, pour les hommes et les femmes de tous les temps et de tous les lieux. Dans le dessein divin, Bethléem, « le plus petit des clans de Juda » (Mi 5, 1), est devenu le lieu d’une gloire ineffaçable : lieu où, à la plénitude des temps, Dieu a choisi de se faire homme, pour mettre fin au long règne du péché et de la mort, et donner une nouvelle et abondante vie à un monde devenu vieux, las et opprimé par le manque d’espérance.

Pour tous les êtres humains, Bethléem est associée à l’heureux message de renaissance, de renouveau, de lumière et de liberté. Toutefois, ici, au milieu de nous, comme cette merveilleuse promesse semble loin d’être réalisée ! Combien lointain paraît être ce Royaume dont le pouvoir est étendu, royaume de paix, de sécurité, de justice et d’intégrité que le prophète Isaïe annonçait dans la première lecture (cf. Is 9, 5-6) et que nous proclamons définitivement établi par la venue de Jésus Christ, Messie et Roi !

Depuis le jour de sa naissance, Jésus a été en fait « un signe de division » (Lc 2, 34), et il continue à l’être, même de nos jours. Le Seigneur des armées, dont les « origines remontent aux temps anciens, à l’aube des siècles » (Mi 5, 1), a souhaité inaugurer son Royaume en prenant naissance dans cette petite bourgade, entrant en notre monde dans le silence et l’humilité d’une grotte, et reposant, comme un enfant sans défense, dans une mangeoire. Ici, à Bethléem, au milieu de toutes sortes de contradictions, les pierres continuent à proclamer cette « bonne nouvelle », le message de la rédemption, que cette ville, plus que toute autre, est appelée à proclamer au monde. Car c’est ici que, d’une manière qui surpassa toute espérance et toute attente humaine, Dieu s’est montré fidèle à ses promesses. Par la naissance de son Fils, il a révélé la venue du Royaume de l’amour : un amour divin qui se penche sur nous afin de nous apporter la guérison et de nous relever ; un amour qui est manifesté dans l’humiliation et la faiblesse de la Croix, et qui cependant triomphe dans la gloire de la Résurrection pour une nouvelle vie. Le Christ a apporté un Royaume qui n’est pas de ce monde, mais c’est un Royaume capable de changer ce monde, car il a le pouvoir de changer les cœurs, d’illuminer les esprits et de fortifier les volontés. En prenant notre chair, avec toutes ses faiblesses et en la transfigurant par la puissance de son Esprit, Jésus a fait de nous les témoins de sa victoire sur le péché et la mort. Et c’est bien ce que le message de Bethléem nous appelle à être : témoins du triomphe de l’Amour de Dieu sur la haine, l’égoïsme, la peur et le ressentiment qui paralysent les relations humaines et engendrent la division là où des frères devraient habiter ensemble dans l’unité, la destruction là où les hommes devraient construire, le désespoir là où l’espérance devrait fleurir !

« En espérance, nous avons été sauvés » (Rm 8, 24), dit l’Apôtre Paul. Mais il affirme en même temps, avec un parfait réalisme que la création continue à gémir en travail d’enfantement, alors même que, nous qui avons reçu les prémices de l’Esprit, nous attendons patiemment l’accomplissement de notre rédemption (cf. Rm 8, 22-24). Dans la deuxième lecture d’aujourd’hui, Paul tire de l’Incarnation une leçon qui est particulièrement adaptée au travail dont vous-mêmes, peuple choisi de Dieu à Bethléem, faite l’expérience : « la grâce de Dieu s’est manifestée », nous dit-il, « elle nous apprend à rejeter le péché et les passions d’ici-bas, pour vivre dans le monde présent en hommes raisonnables, justes et religieux » (Tt 2, 11-13) alors que nous attendons la manifestation de notre bienheureuse espérance, Jésus Christ, le Sauveur.

Est-ce que ce ne sont pas là les vertus requises pour les hommes et les femmes qui vivent dans l’espérance ? En premier lieu, la constante conversion au Christ qui rejaillit non seulement sur nos actes mais aussi dans nos raisonnements : avoir le courage d’abandonner des manières infructueuses de penser, d’agir et de réagir. Ensuite, cultiver un état d’esprit de paix fondée sur la justice, sur le respect des droits et des devoirs de tous et l’engagement à coopérer pour le bien commun. Et aussi la persévérance, persévérance dans le bien et dans le refus du mal. Ici à Bethléem, il est demandé aux disciples du Christ une persévérance particulière : celle d’être des témoins fidèles de la gloire de Dieu qui s’est manifestée ici, par la naissance de son Fils, des témoins de la bonne nouvelle de sa paix qui est venue des cieux pour demeurer ici-bas.

« N'ayez pas peur ! » C’est le message que le Successeur de saint Pierre désire vous laisser aujourd’hui, se faisant l’écho du message des anges et c’est la mission que notre bien-aimé Pape Jean-Paul II vous laissa lorsqu’il vint chez vous en l’année du Grand Jubilé de la naissance du Christ. Appuyez-vous sur la prière et la solidarité de vos frères et sœurs de l'Église universelle et, par des initiatives concrètes, travaillez à consolider votre présence ici et à offrir de nouvelles opportunités à ceux qui sont tentés de partir. Soyez des ponts de dialogue et de coopération constructive pour l’édification d’une culture de paix qui doit remplacer l’impasse actuelle de la peur, de l'agression, de la frustration. Développez vos Églises locales, faisant d’elles des ateliers de dialogue, de tolérance et d’espérance, autant que de solidarité et de charité concrète.

Par-dessus tout, soyez les témoins de la puissance de la vie, de la vie nouvelle apportée par le Christ ressuscité, la vie qui peut illuminer et transformer les situations humaines les plus sombres et les plus désespérantes. Votre patrie n’a pas seulement besoin de structures économiques et politiques nouvelles, mais d’une manière bien plus importante, pourrions-nous dire, il lui faut une nouvelle infrastructure « spirituelle », capable de galvaniser les énergies de tous les hommes et de toutes les femmes de bonne volonté pour le service de l’éducation, du développement et de la promotion du bien commun. Vous avez chez vous les ressources humaines pour construire cette culture de paix et de respect mutuel qui pourra garantir un avenir meilleur à vos enfants. Voilà la noble entreprise qui vous attend. N’ayez pas peur !

La vénérable Basilique de la Nativité, battue par les vents de l’histoire et le poids des ans, se tient devant nous en témoin de la foi qui supporte et triomphe du monde (cf. 1 Jn 5, 4). Toute personne qui visite Bethléem ne peut pas ne pas remarquer qu’au cours des siècles le grand portail qui ouvre sur la maison de Dieu est devenu progressivement plus petit. Prions aujourd’hui pour que, par la grâce de Dieu et avec notre engagement, la porte qui ouvre sur le mystère de Dieu venu demeurer parmi les hommes, temple de notre communion à son amour, et préfiguration d’un monde de paix éternelle et de joie, s’ouvre toujours davantage pour accueillir, renouveler et transformer chaque cœur humain. De cette manière, Bethléem continuera à se faire l’écho du message confié aux bergers, à nous-mêmes, et à toute l’humanité : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes qu’il aime » !

Amen.


Marwan Barghouti ! Qui est-ce ?

Pour les Israéliens,  c’est un terroriste condamné en Israël pour des attentats et des meurtres sur le sol Israélien. Un terroriste dans la définition classique de la loi internationale. Car en effet, il est certain que commettre des attentats contre des civils ne peut pas être autre chose que du terrorisme et de la pire espèce.


Pour les Palestiniens
,
il est un héros, un Chef pour les plus fanatiques. Il est l'intifada. Cette Intifada ou l'on peut voir, comme sur cette photo, des Palestiniens brandirent un drapeau bien connu dans nos régions et tellement significatif de la pensée humaniste de certains palestiniens et de ses dirigeants.


Pour nos bonnes âmes de France, les simplets habituels,
 ceux qui ne voient rien, n'entendent rien, il est un nouveau Nelson Mandela. En effet c’est comme cela que l’appellent certains, depuis qu’il est emprisonné. Et jusqu’où vont-ils ?

La ville de Pierrefite en Juin 2007 souhaitait en faire un « citoyen d’honneur ». Mais le conseil municipal  se conforma aux recommandations du Préfet du 93.

Ce fût le tour de la ville Stains dans le 93 qui, là aussi retira sa proposition de faire de Marwan Barghouti un citoyen d’honneur.

Ce soir c’est la ville de Gennevilliers qui souhaite en faire un citoyen d’honneur.

Décidément, je vais finir par croire que dans ces Mairies de gauche, à forte connotation communiste, l’honneur à trop souvent le goût du sang. Du sang israélien, juif et/ou sioniste.  J’espère que non.

Car la mort d’innocents qu’ils soient Palestiniens ou Israéliens devrait nous rendre modeste sur la distribution de titres élogieux.  

En quoi Marwan Barghouti condamné pour plusieurs meurtres à la prison à vie devrait devenir Citoyen d’Honneur d’une ville de France ?

Le fait d’assassiner des civils serait donc un acte d’honneur pour ces municipalités ?

La guerre est quelque chose d’ignoble dans son aveuglement. Des innocents meurent de chaque côté des frontières visibles ou invisibles. C’est la mort qui emporte des enfants dans des attentats à la bombe ! Ce sont d’autres bombes qui tuent et éparpillent les chairs et les os disloqués.

Derrière ces bombes humaines, ces bombes venant d’avions il y a des raisons, des idées, des hommes. Elles tuent beaucoup d’innocents ces bombes. Marwan Barghouti fait partie de ces hommes qui font tuer et ont tué des innocents.

Au nom de quoi ? D’une opinion, d’une volonté politique, d’une ambition !

Rien ne peut justifier la mort d’enfants innocents par définition. Il faut avoir vu des photos de corps de femmes et d’enfants déchiquetés par une bombe humaine pour bien comprendre qu’il est tout simplement inconvenant qu’une ville française, par idéologie et séduction d’un potentiel électorat, s’abaisse à déclarer citoyen d’honneur un homme condamné pour meurtres.

Quand viendra l’heure de la paix il sera toujours tant pour les différentes parties de déclarer héros nationals ceux qu’elles voudront.

Il y a des héros dans certains pays, qui sont considérés comme des criminels de guerre pour d’autres ! C’est l’Histoire qui apaisera les tourments et établira des ponts entre les peuples . Pour le moment, laissons Israël et les palestiniens trouver la voie de la paix sans que nous, français, décidions qui est le bon et qui est le mauvais.

C’est pourquoi je trouve honteux ce coup de pub de la ville de Gennevilliers si prompte d’ailleurs à donner des leçons d’habitude.

 

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Gérard Brazon
Lire aussi cet article.
http://sitasecure.wordpress.com/2009/04/27/la-ville-divry-soutient-le-terroriste-marwane-barghouti-action-sita-par-courriels/


Qui est vraiment Benoît XVI ?

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Lu dans le Figaro du mardi 12 mai 2009 :

Depuis le début de l’année, le pape a été l’objet d’intenses polémiques. Quelle est sa vraie pensée ? Comment gouverne-t-il l’Eglise ? Jusqu’au vendredi 15 mai, Benoît XVI est en Terre sainte. A l’occasion de ce pèlerinage qui est aussi un voyage à résonance politique, Le Figaro Magazine a enquêté sur ce pape qui fait réagir. Le voyage de Benoît XVI, chef de l’Eglise catholique, est d’abord un pèlerinage en Terre sainte, sur les lieux où le christianisme est né. Mais au cours de cette semaine, le souverain pontife se sera également rendu au mont Nébo, sur les pas de Moïse, au Mur des lamentations ou au mémorial de Yad Vashem, qui sont autant de symboles pour le peuple juif. Il visitera par ailleurs la mosquée al-Hussein Bin- Talal, à Amman, ou le Dôme du Rocher, à Jérusalem, deux sanctuaires musulmans. En termes politiques, enfin, le pape foulera le sol de la Jordanie, d’Israël et des territoires palestiniens, et rencontrera leurs dirigeants. Sur cette terre d’Orient où s’entremêlent les religions, les peuples, les Etats et les cultures, les lignes de partage sont subtiles. De même que paraît mince, hélas, la distance qui sépare l’amour de la haine. A tous ceux qui vivent ici, quelles que soient leur confession ou leur nationalité, Benoît XVI vient bien sûr porter un message d’amour et de paix. Le patriarche latin de Jérusalem, Sa Béatitude Fouad Twal, résumait néanmoins la situation, il y a quelques jours, dans une interview recueillie par l’agence Zenit : « Le Saint-Père arrive dans un moment difficile, dans une région difficile, pour rendre visite à des gens très sensibles ». Voyage à haut risque ? Les pays qui invitent Benoît XVI ont intérêt à ce que tout se déroule bien. Mais le pontificat de Joseph Ratzinger, qui semblait initialement voué à couler comme un long fleuve tranquille, a suscité à intervalles réguliers des controverses telles – depuis l’affaire du discours de Ratisbonne, en 2006, jusqu’à la série des trois polémiques du premier trimestre 2009 – qu’on en viendrait à guetter la prochaine campagne contre lui. Benoît XVI serait-il en passe de devenir le grand incompris de notre temps, en butte à une hostilité systématique ? Quel paradoxe, pour un intellectuel au verbe doux, qui a personnellement en horreur toute forme de radicalisme ou de fanatisme et qui ne rêve que de célébrer les noces de la foi et de la raison ! Les trois crises qui, depuis le début de l’année, ont éclaté sur la scène publique à propos de l’Eglise, n’étaient pas du même ordre, et n’engageaient pas nécessairement le pape. Elles ont cependant eu pour résultat commun de brouiller l’image du souverain pontife auprès du grand public. D’abord, la levée de l’excommunication des évêques sacrés par Mgr Lefebvre, acte voulu par le pape dans un esprit d’unité entre chrétiens, et qui s’est retourné contre lui. Ce geste magnanime, compromis par le scandale Williamson et gâché par les services de la curie, qui n’ont pas su l’expliquer à temps, a conduit Benoît XVI à devoir se justifier, après avoir subi une accusation de faiblesse envers le négationnisme – lui dont la pensée, depuis cinquante ans, est en dialogue avec le mystère d’Israël –, ou après avoir affronté le soupçon de vouloir liquider Vatican II, lui qui participa comme expert à un concile qu’il n’a cessé d’approfondir à travers son enseignement, afin de lui donner sa place dans la continuité et l’homogénéité du développement bimillénaire de l’Eglise. L’histoire fera la part de la manipulation dans cette affaire (en Allemagne ou à Rome, les réseaux anti-Ratzinger sont actifs), mais, même si nul ne connaît l’avenir, le bilan, dans ce domaine, demeure celui d’une occasion ratée. L’affaire de Recife ne saurait être mise au compte de Benoît XVI. Là aussi, il faudrait faire la part de ce qui relève de la bataille d’opinion qui a lieu au Brésil, pays où un projet de libéralisation de l’avortement déclenche un vif débat. Néanmoins, dans un cas aussi dramatique que celui d’une fillette violée, la parole de principe a d’abord paru prévaloir sur les sentiments d’humanité. Ces sentiments ont pourtant été exprimés à tous les niveaux par des hommes d’Eglise, et notamment par Mgr Fisichella, président de l’Académie pontificale pour la vie et homme de confiance de Benoît XVI, dans une lettre qu’il a écrite à la fillette. Mais combien de télévisions, de radios ou de journaux l’ont répercutée ? Troisième affaire, celle du préservatif. Elle s’est déclenchée à partir d’une phrase extraite de son contexte, et avec une perception du sujet qui n’a absolument pas été la même en Europe qu’en Afrique, où l’on considère que le voyage de Benoît XVI a été un succès. Propos déformés, amalgames, caricatures d’un côté. Déficit d’explication et de communication de l’autre. Trois polémiques en trois mois, à propos de faits n’ayant rien à voir entre eux. Un seul fil rouge médiatique : Benoît XVI, celui par qui le mal arrive. Mgr Vingt-Trois, cardinal archevêque de Paris, interrogé par le Talk Orange-Le Figaro, a souligné que certains avaient cherché à «se payer le pape». A cet égard, quelle valeur faut-il accorder aux sondages réalisés dans de tels moments d’unanimité forcée ? 57 % des Français ayant une mauvaise opinion du pape (Le Parisien/Aujourd’hui en France du 21 mars 2009), 43 % des catholiques se disant favorables à la démission de Benoît XVI (Le Journal du dimanche, 22 mars 2009), ces chiffres ont-ils un sens ? La magistrature pontificale n’obéissant pas aux règles de la « Star Academy », Joseph Ratzinger est et restera le chef de l’Eglise catholique. Elu à 78 ans, sachant qu’il ne disposerait pas des mêmes atouts que Jean-Paul II, dont il avait été le serviteur pendant presque tout son pontificat, Benoît XVI a d’emblée fait le choix d’être lui-même. Cet homme d’étude a pris sur lui, sans doute, en acceptant de voyager et d’aller au-devant des foules, ce qui n’est pas dans sa nature. Et pourtant, il survient ceci, que veulent ignorer les commentaires qui dénoncent « un pape isolé » : lors de ses voyages, aux Etats- Unis, en Australie, en Afrique, en Espagne ou en France (se rappeler la messe de l’esplanade des Invalides ou de Lourdes), les masses sont au rendez-vous. A Rome, les audiences du mercredi et la prière de l’angélus, chaque dimanche, rassemblent un public compact, plus nombreux et peut-être plus attentif que sous Jean-Paul II. Quand Benoît XVI chausse ses lunettes de professeur et qu’il entame son discours, l’auditoire sait qu’il va dire des choses difficiles, parfois des choses qui passent au-dessus de la tête. Mais les gens l’écoutent, car la soif de compréhension du monde et le besoin de clés pour conduire sa vie taraudent beaucoup de nos contemporains, déboussolés par le bouleversement des repères. Or Benoît XVI veut contribuer à étancher cette soif et à donner ces clés. Dans la lettre aux évêques du monde entier qu’il a rédigée après la polémique déclenchée par l’affaire des prélats lefebvristes – lettre émouvante, témoignant d’une grande souffrance personnelle –, Benoît XVI résumait ce qui, à ses yeux, est l’essentiel de sa mission. « Conduire les hommes vers Dieu, vers le Dieu qui parle dans la Bible, écrivait-il, c’est la priorité suprême et fondamentale de l’Eglise et du successeur de Pierre aujourd’hui ». Ce pape, assurément, n’est pas de la génération internet. Il réfléchit. Il travaille. Longuement. Lentement. A l’heure de la culture superficielle ou du zapping-roi, ce style peut dérouter. Mais Benoît XVI ne changera pas. Son Jésus de Nazareth (2007) est un livre fondamental. Sa première encyclique, Deus caritas est, publiée en 2006, est une méditation sur l’amour et la charité. La deuxième, Spe salvi, parue en 2007, forme une réflexion sur l’espérance. La troisième, consacrée aux questions sociales, devait sortir fin 2008, puis a été annoncée pour ce printemps, et maintenant pour l’été prochain. Raison de ces ajournements ? Le texte a été remis à l’ouvrage afin de prendre en compte les effets récents de la crise économique. Qui a dit que Benoît XVI était coupé des réalités ? Il ne cesse de les interroger, au contraire, mais à son rythme, et pour indiquer des directions qu’il est le seul à rappeler. Chacun est libre de croire ou non en Dieu. Ou d’être ou non catholique. Mais refuser d’écouter Benoît XVI pour des motifs qui n’ont rien à voir avec lui, ou parce qu’on préférerait un pape différent, n’est-ce pas se priver d’une des plus belles intelligences de l’époque, et d’une vigie capable de s’adresser à tous les hommes ? Dans ce domaine, pourtant, il n’y a pas pléthore.

Sources: Blog de Michel Garroté

 


J'ai encore Honte à ma France !

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Homélie du pape Benoît XVI
lors de la messe célébrée dans la Vallée de Josaphat



Jérusalem, mardi 12 mai 2009
Source : Vatican (traduction de travail)

***

Chers Frères et Sœurs,

« Le Christ est ressuscité, alléluia ! ». Par ces mots, je vous salue avec une très grande affection. Je remercie le Patriarche Fouad Twal pour les paroles de bienvenue qu’il m’a adressées en votre nom, et avant tout, j’exprime ma joie de pouvoir célébrer cette Eucharistie avec vous, qui êtes l'Église à Jérusalem. Nous sommes rassemblés sous le Mont des Oliviers, où notre Seigneur a prié et a souffert, où il a pleuré par amour de cette Ville et à cause du désir qu’elle puisse connaître ce qui pouvait lui « donner la paix » (Lc 19, 42). De ce lieu, il est retourné vers le Père, donnant son ultime bénédiction terrestre à ses disciples et à nous. Aujourd’hui, recevons cette bénédiction. Il vous la donne d’une façon particulière, chers frères et sœurs, qui êtes reliés par une chaîne interrompue avec les premiers disciples qui ont rencontré le Seigneur ressuscité et l’ont reconnu à la fraction du pain, ceux qui ont été convertis en écoutant la prédication de saint Pierre, et ceux qui, les premiers, ont fait l’expérience de l’Esprit répandant la plénitude de ses dons à la Pentecôte. Je salue également tous ceux qui sont présents, et aussi tous les fidèles de Terre sainte qui, pour diverses raisons, n’ont pu nous rejoindre aujourd’hui.

Comme Successeur de saint Pierre, j’ai mis mes pas dans les siens afin de proclamer au milieu de vous le Christ ressuscité, de vous confirmer dans la foi de vos pères et d’invoquer sur vous la consolation qui est le don du Paraclet. Me tenant devant vous aujourd’hui, je ne peux oublier les difficultés, les frustrations, les épreuves et les souffrances que tant de vous ont dû supporter à cause des conflits qui ont affecté ces terres, sans parler des amères expériences de déplacement auquel tant de vos familles ont été contraintes et – qu’à Dieu plaise – puissiez-vous ne plus connaître. J’espère que ma venue ici est ressentie comme le signe que vous n’êtes pas oubliés, que votre présence persévérante et votre témoignage sont hautement précieux aux yeux de Dieu et importants pour l’avenir de ces terres. En raison justement des profondes racines que vous avez dans cette terre, de votre culture chrétienne, forte et ancienne, ainsi que de votre confiance inébranlable dans la fidélité de Dieu à ses promesses, vous, Chrétiens de Terre Sainte, vous êtes appelés à servir non seulement comme une lumière-témoin de foi pour l'Église universelle, mais aussi comme un levain d’harmonie, de sagesse et d’équilibre dans la vie d’une société qui, traditionnellement, a été pluraliste, multiethnique et plurireligieuse et qui continue à l’être.

Dans la deuxième lecture de ce jour, l’Apôtre Paul demande aux Colossiens de « rechercher les réalités d’en haut : c’est là qu’est le Christ, assis à la droite de Dieu » (Col 3, 1). Ses paroles résonnent avec une force particulière ici, au pied du Mont des Oliviers où Jésus a accepté le calice de la souffrance dans une complète soumission à la volonté du Père, et d’où, selon la tradition, il est monté pour siéger à la droite du Père intercédant sans cesse pour nous, les membres de son Corps. Saint Paul, le héraut puissant de l’espérance chrétienne, savait bien quel est le prix de cette espérance, ce qu’elle coûte en souffrances et persécutions pour la cause de l’Évangile, néanmoins il n’a jamais fléchi dans sa conviction que la résurrection du Christ marque le début d’une nouvelle création. Et il nous dit : « Quand paraîtra le Christ, votre vie, alors vous aussi, vous paraîtrez avec lui en pleine gloire » (Col 3, 4) !

L’exhortation de Paul à « rechercher les réalités d’en haut » doit résonner sans cesse en nos cœurs. Par ses paroles, il nous oriente vers le plein accomplissement de la vision de foi dans la Jérusalem céleste, là où, conformément aux antiques prophéties, Dieu essuiera toute larme de nos yeux et préparera pour le salut de tous les peuples un festin (cf. Is 25 6-8 ; Ap 21, 2-4).

Voilà l’espérance, voilà la vision, qui inspire tous ceux qui aiment la Jérusalem terrestre et qui la voient comme une prophétie, la promesse de la réconciliation universelle et de la paix que Dieu désire pour toute la famille humaine. Mais, sous les murs de cette même Cité, nous sommes amenés à constater avec tristesse combien notre monde est éloigné de l’accomplissement plénier de cette prophétie et de cette promesse. Dans cette Ville Sainte où la Vie l’a emporté sur la mort, où l’Esprit a été répandu comme les prémices de la nouvelle création, l’espérance doit toujours se battre contre le désespoir, contre les frustrations et le cynisme, tandis que la paix, qui est don de Dieu et à laquelle il nous appelle, continue à être menacée par l’égoïsme, les conflits, les divisions et par le fardeau des erreurs du passé. C’est pour cela que la Communauté chrétienne de cette Cité, où eut lieu la résurrection du Christ et où fut répandu l’Esprit, doit d’autant plus tenir ferme dans l’espérance que donne l’Évangile, s’appuyant sur la promesse de la victoire définitive du Christ sur le péché et la mort, témoignant de la puissance du pardon et rendant visible la nature la plus profonde de l'Église qui est d’être signe et sacrement d’une humanité réconciliée, renouvelée et unie dans le Christ, nouvel Adam.

Tandis que nous sommes ici rassemblés au pied des remparts de cette cité, que les disciples de trois grandes religions considèrent comme sacrés, comment pouvons-nous ne pas songer à la vocation universelle de Jérusalem ? Annoncée par les prophètes, cette vocation apparaît aussi comme un fait indiscutable, comme une réalité à jamais enracinée dans l’histoire complexe de cette ville et de ses habitants. Les Juifs, les Musulmans tout comme les Chrétiens considèrent cette cité comme leur patrie spirituelle. Comme il reste beaucoup à faire pour faire en sorte qu’elle soit véritablement une « cité de paix » pour tous les peuples, où tous peuvent venir en pèlerinage pour chercher Dieu et écouter sa voix, une voix qui « annonce la paix » (cf. Ps 85, 9) !

De fait, Jérusalem est depuis toujours une ville où résonne dans les rues l’écho de langues différentes, où cheminent sur les pavés des peuples de toute race et langue, et dont les murs sont un symbole de l’amour providentiel de Dieu pour la famille humaine tout entière. Comme un microcosme de notre univers mondialisé, cette Ville, si elle veut vivre en conformité à sa vocation universelle, doit être un lieu qui enseigne l’universalité, le respect des autres, le dialogue et la compréhension mutuelle ; un lieu où les préjugés, l’ignorance et la peur qui les alimentent, sont mis en échec par l’honnêteté, le bon droit et la recherche de la paix. Il ne devrait pas y avoir place, à l’intérieur de ces murs, pour la violence, l’étroitesse d’esprit, l’oppression et la vengeance. Ceux qui croient en un Dieu miséricordieux – qu’ils se reconnaissent comme Juifs, Chrétiens ou Musulmans – doivent être les premiers à promouvoir cette culture de réconciliation et de paix, sans se laisser décourager par la pénible lenteur des progrès ni par le lourd fardeau des souvenirs du passé.

Ici, je voudrais parler sans détours de la tragique réalité – qui ne peut manquer d’être source de préoccupations pour tous ceux qui aiment cette Ville et cette terre – du départ de tant de membres de la Communauté chrétienne depuis ces dernières années. S’il est bien compréhensible que certaines raisons puissent pousser un grand nombre – spécialement les jeunes - à prendre la décision d’émigrer, il reste que cette décision a pour conséquence un véritable appauvrissement culturel et spirituel de la Ville. Je veux répéter aujourd’hui ce que j’ai déjà dit en d’autres occasions : en Terre Sainte, il y a de la place pour tous ! En demandant aux Autorités civiles de respecter et de soutenir la présence chrétienne ici, je veux également vous assurer de la solidarité, de l’amour et du soutien de toute l'Église et du Saint-Siège.

Chers amis, dans l’Évangile qui vient d’être proclamé, saint Pierre et saint Jean courent vers le tombeau vide, et Jean, nous dit-on : « vit et crut » (Jn 20, 8). Ici, sur la Terre Sainte, avec les yeux de la foi, vous avez la grâce, avec tous les pèlerins du monde entier qui affluent dans ses églises et ses sanctuaires, de « voir » les lieux sanctifiés par la présence du Christ, par son ministère ici-bas, sa passion, sa mort et sa résurrection ainsi que par le don de l’Esprit Saint. Ici, tout comme l’Apôtre saint Thomas, vous pouvez « toucher » les réalités historiques qui sont à la base de notre profession de foi dans le Fils de Dieu. Ma prière pour vous aujourd’hui est que vous puissiez continuer, jour après jour, à « voir et reconnaitre dans la foi » les signes de la Providence de Dieu et de sa miséricorde infinie, que vous puissiez « écouter » avec une foi et une espérance renouvelées les paroles réconfortantes de la prédication apostolique, et « toucher » les sources de la grâce dans les sacrements afin d’incarner pour d’autres leur promesse de commencements nouveaux, la liberté qui jaillit du pardon, la lumière intérieure et la paix qui peuvent apporter guérison et espérance dans les réalités humaines les plus sombres.

Dans la Basilique du Saint-Sépulcre, les pèlerins de chaque siècle ont vénéré la pierre qui, selon la tradition, fermait l’entrée du tombeau au matin de la résurrection du Christ. Revenons souvent vers ce tombeau vide. Affirmons notre foi dans la victoire de la Vie et prions pour que chaque « lourde pierre » qui ferme nos cœurs, et bloque notre totale adhésion au Seigneur dans la foi, l’espérance et l’amour, puisse voler en éclats sous la puissance de la lumière et de la vie qui, au premier matin de Pâques, s’est répandue de Jérusalem jusqu’au bout du monde. Le Christ est ressuscité, alléluia ! Il est vraiment ressuscité, alléluia !


Discours du pape Benoît XVI sur l'Esplanade des mosquées


Jérusalem, mardi 12 mai 2009
Source : Vatican

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Chers Amis Musulmans,

As-salámu ‘aláikum ! La paix soit avec vous !

Je remercie cordialement le Grand Mufti, Muhammad Ahmad Hussein, ainsi que le Président du Waqf Islamique de Jérusalem, Sheikh Mohammed Azzam al-Khatib al-Tamimi, et le Chef du Conseil Awquaf, Sheikh Abdel Azim Salhab, pour leurs aimables paroles de bienvenue. Je vous suis profondément reconnaissant de m’avoir invité à visiter ce lieu sacré, et je présente volontiers mes respects à vous-mêmes et aux responsables de la Communauté musulmane de Jérusalem.

Le dôme du Rocher invite nos cœurs et nos esprits à réfléchir sur le mystère de la création et sur la foi d’Abraham. Ici, les chemins des trois grandes religions monothéistes du monde se rencontrent, nous rappelant ce qu’elles ont en commun. Chacune croit en un Dieu unique, créateur et régissant toute chose. Chacune reconnaît en Abraham un ancêtre, un homme de foi auquel Dieu accorda une bénédiction spéciale. Chacune a rassemblé de nombreux disciples tout au long des siècles et a inspiré un riche patrimoine spirituel, intellectuel et culturel.

Dans un monde tristement déchiré par les divisions, ce lieu sacré sert de stimulant et met aussi les hommes et les femmes de bonne volonté au défi de travailler afin que soient dépassés les malentendus et les conflits du passé et que soit ouvert le chemin d’un dialogue sincère destiné à construire un monde de justice et de paix pour les futures générations.

Puisque les enseignements des traditions religieuses concernent, en fin de compte, la réalité de Dieu, le sens de la vie et la destinée commune de l’humanité – c’est-à-dire, tout ce qu’il y a de plus sacré et de plus précieux pour nous -, on peut être tenté ici de s’engager dans un tel dialogue avec crainte et doute quant aux possibilités de succès. Néanmoins, nous pouvons commencer par nous appuyer sur la foi au Dieu unique, source infinie de justice et de miséricorde, puisqu’en lui ces deux qualités existent dans un parfaite unité. Ceux qui croient en son nom ont le devoir de s’efforcer inlassablement d’être justes en imitant son pardon, car les deux qualités sont orientées intrinsèquement vers la coexistence pacifique et harmonieuse de la famille humaine.

Pour cette raison, il est de la plus haute importance que ceux qui adorent le Dieu Unique puissent montrer qu’ils sont à la fois enracinés dans et orientés vers l’unité de la famille humaine tout entière. En d’autres termes, la fidélité au Dieu Unique, le Créateur, le Très-Haut, conduit à reconnaître que les êtres humains sont fondamentalement en relation les uns avec les autres, puisque tous doivent leur existence véritable à une seule source et tous marchent vers une fin commune. Marqués du sceau indélébile du divin, ils sont appelés à jouer un rôle actif en réparant les divisions et en promouvant la solidarité humaine.

Cela fait peser sur nous une grande responsabilité. Ceux qui honorent le Dieu Unique croient qu’il tiendra les êtres humains responsables de leurs actions. Les Chrétiens affirment que le don divin de la raison et de la liberté est à la base de ce devoir de répondre de ses actes. La raison ouvre l’esprit à la compréhension de la nature et de la destinée communes de la famille humaine, tandis que la liberté pousse les cœurs à accepter l’autre et à le servir dans la charité. L’amour indivisible pour le Dieu Unique et la charité envers le prochain deviennent ainsi le pivot autour duquel tout tourne. C’est pourquoi nous travaillons infatigablement pour préserver les cœurs humains de la haine, de la colère ou de la vengeance.

Chers amis, je suis venu à Jérusalem pour un pèlerinage de foi. Je remercie Dieu de cette occasion qui m’est donnée de vous rencontrer comme Évêque de Rome et Successeur de l’Apôtre Pierre, mais aussi comme fils d’Abraham, en qui « seront bénies toutes les familles de la terre » (Gn 12, 3 ; cf. Rm 4, 16-17). Je vous assure que l’Église désire ardemment coopérer au bien-être de la famille humaine. Elle croit fermement que la réalisation de la promesse faite à Abraham est universelle dans son ampleur, embrassant tout homme et toute femme, sans considération pour sa provenance ou pour son statut social. Tandis que Musulmans et Chrétiens poursuivent le dialogue respectueux qu’ils ont entamé, je prie pour qu’ils cherchent comment l’Unicité de Dieu est liée de façon inextricable à l’unité de la famille humaine. En se soumettant à son dessein d’amour sur la création, en étudiant la loi inscrite dans le cosmos et gravée dans le cœur de l’homme, en réfléchissant sur le don mystérieux de l’autorévélation de Dieu, puissent les croyants continuer à maintenir leurs regards fixés sur la bonté absolue de Dieu, sans jamais perdre de vue la manière dont elle se reflète sur le visage des autres !

Avec ces sentiments, je demande humblement au Tout-Puissant de vous apporter la paix et de bénir l’ensemble des populations bien-aimées de cette région. Puissions-nous nous efforcer de vivre dans un esprit d’harmonie et de coopération, rendant témoignage au Dieu Unique en servant généreusement les autres ! Merci.


Discours du pape Benoît XVI au siège du Grand Rabbinat de Jérusalem


Jérusalem, mardi 12 mai 2009
Source : Vatican

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Messieurs les Grands Rabbins,

Chers Amis,

Je vous suis reconnaissant de m’avoir invité à visiter Heichal Shlomo et à vous rencontrer durant mon voyage en Terre Sainte en tant qu’Évêque de Rome. Je remercie le Rabbin Sépharade Shlomo Amar et le Rabbin Ashkenaze Yona Metzger pour leurs paroles chaleureuses de bienvenue et pour le désir qu’ils ont exprimé de continuer à renforcer les liens d’amitié que l’Église catholique et le Grand Rabbinat se sont efforcés avec assiduité de forger au cours des dernières décennies. Vos visites au Vatican en 2004 et 2005 sont un signe de la bonne volonté qui caractérise le développement de nos relations.

Messieurs les Rabbins, en retour, je vous exprime mes propres sentiments de respect et d’estime, que j’étends à vos communautés, et je vous assure de mon désir d’approfondir la compréhension mutuelle et la coopération entre le Saint-Siège, le Grand Rabbinat d’Israël et le peuple juif à travers le monde.

C’est une source de grande satisfaction pour moi, depuis le début de mon pontificat, de voir les fruits produits par le dialogue en court entre la Délégation de la Commission du Saint-Siège pour les Relations religieuses avec les Juifs et le Grand Rabbinat de la Délégation d’Israël pour les Relations avec l’Église catholique. Je désire remercier les membres des deux délégations pour leur dévouement et leur dur labeur en vue de concrétiser cette initiative, si ardemment désirée par mon vénéré prédécesseur le Pape Jean-Paul II, comme il l’avait exprimé durant le Grand jubilé de l’An 2000.

Notre rencontre, aujourd’hui, est une occasion des plus appropriées de remercier le Tout-Puissant pour les nombreuses bénédictions qui ont accompagnées le dialogue conduit par la Commission bilatérale, et pour envisager avec confiance les prochaines sessions. La bonne volonté des délégués à discuter ouvertement et patiemment non seulement sur les points de convergence, mais aussi de désaccord, a déjà ouvert la voie à une collaboration plus effective dans la vie publique. Juifs et Chrétiens sont concernés de la même manière pour assurer le respect de la nature sacrée de la vie humaine, le caractère central de la famille, une éducation solide des jeunes, et la liberté de religion et de conscience dans une société saine. Ces thèmes de dialogue ne sont toutefois que les phases initiales de ce qui, nous le croyons, sera un cheminement continu et progressif vers une compréhension mutuelle plus grande.

Une indication du potentiel de ces rencontres peut être facilement aperçue à travers notre commune préoccupation face au relativisme moral et aux violations qu’il engendre contre la dignité de la personne humaine. En abordant les questions éthiques les plus urgentes de notre époque, nos deux communautés sont confrontées au défi d’engager les hommes de bonne volonté à se placer au niveau de la raison, tandis que simultanément, elles doivent mettre en évidence les fondements religieux qui soutiennent le mieux les valeurs morales ultimes. Puisse le dialogue qui a commencé, continuer à susciter des idées sur la manière dont les Chrétiens et les Juifs peuvent travailler afin que grandisse l’estime de la société envers la contribution remarquable de nos traditions religieuses et éthiques. Ici, en Israël, étant donné que les Chrétiens ne constituent seulement qu’une petite portion de la population totale, ils attachent une valeur particulière aux occasions de dialogue avec leurs voisins juifs.

La confiance est sans aucun doute un élément essentiel du dialogue véritable. Aujourd’hui, m’est offerte la possibilité de répéter que l’Église catholique est engagée de façon irrévocable sur le chemin choisi par le Concile Vatican II en faveur d’une réconciliation authentique et durable entre les Chrétiens et les Juifs. Comme Nostra Aetate le dit clairement, l’Église continue de valoriser le patrimoine commun aux Chrétiens et aux Juifs et désire une compréhension mutuelle et un respect toujours plus profonds à travers les études bibliques et théologiques comme à travers les dialogues fraternels. Puissent les sept rencontres des Commissions bilatérales qui se sont déjà tenues entre le Saint-Siège et le Grand Rabbinat en être une preuve ! Je vous suis donc reconnaissant de l’assurance que vous avez manifestée que les relations entre le Saint-Siège et le Grand Rabbinat continueront, à l’avenir, à croître dans le respect et la compréhension.

Chers amis, je vous exprime à nouveau ma profonde appréciation pour l’accueil que vous m’avez réservé aujourd’hui. Je suis sûr que notre amitié continuera d’être un exemple de confiance dans le dialogue entre Juifs et Chrétiens à travers le monde. En regardant les réalisations accomplies jusqu’à présent, et en tirant notre inspiration des Saintes Écritures, nous pouvons regarder l’avenir avec confiance concernant la coopération toujours plus ardente entre nos communautés – ainsi qu’avec toutes les personnes de bonne volonté – afin de dénoncer la haine et les persécutions à travers le monde. Je prie pour que Dieu, qui cherche nos cœurs et connaît nos pensées (Ps 139, 23), continue à nous éclairer de sa sagesse, afin que nous puissions suivre ses commandements de l’aimer de tout notre cœur, de toute notre âme et de toutes nos forces (cf. Dt 6, 5), et d’aimer notre prochain comme nous-mêmes (Lv 19, 18). Je vous remercie.


Discours de Benoît XVI au mémorial de Yad Vashem




Jérusalem, lundi 11 mai 2009
Source : Vatican (traduction La Croix)

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« Que les noms de ces victimes ne périssent jamais ! »

« “Je leur donnerai dans ma maison et dans mes remparts un mémorial et un nom (…) ; je leur donnerai un nom éternel qui jamais ne sera effacé” (Is 56, 5).

Ce passage du Livre du prophète Isaïe offre les deux simples mots qui expriment solennellement la signification profonde de ce lieu vénéré : ‘yad ’ – « mémorial » ; ‘shem’ – « nom ». Je suis venu pour me tenir en silence devant ce monument, érigé pour honorer la mémoire des millions de Juifs tués dans l’horrible tragédie de la Shoah. Ils ont perdu leurs vies mais ils ne perdront jamais leurs noms : ceux-ci sont profondément gravés dans les cœurs de ceux qui les aiment, de leurs compagnons de détention qui ont survécu et de tous ceux qui sont déterminés à ne plus jamais permettre qu’une telle atrocité déshonore à nouveau l’humanité. Plus que tout, leurs noms sont à jamais inscrits dans la mémoire du Dieu Tout-Puissant.

On peut dérober à un voisin ce qu’il possède, son avenir ou sa liberté. On peut tisser une toile insidieuse de mensonges pour convaincre les autres que certains groupes ne méritent pas le respect. Néanmoins, quoi que vous fassiez, il est impossible d’enlever son nom à un compagnon en humanité.

L’Écriture Sainte nous enseigne l’importance des noms pour conférer à quelqu’un une mission unique ou un don spécial. Dieu a appelé Abram « Abraham », car celui-ci allait devenir le « Père d’une multitude de nations » (Gn 17, 5). Jacob fut appelé « Israël », car il avait « été fort contre Dieu et contre les hommes et il l’avait emporté » (cf. Gn 32, 29). Les noms inscrits dans ce sanctuaire auront toujours une place sacrée parmi les descendants innombrables d’Abraham. Comme lui, leur foi a été éprouvée. Comme Jacob, ils ont été plongés dans le combat pour discerner les desseins du Tout-Puissant. Puissent les noms de ces victimes ne jamais périr ! Puisse leur souffrance ne jamais être niée, minorée ou oubliée ! Et puissent toutes les personnes de bonne volonté demeurer vigilantes à déraciner du cœur de l’homme tout ce qui peut conduire à des tragédies comme celle-ci !

L’Église catholique, professant les enseignements de Jésus et attentive à imiter son amour pour tous les hommes, éprouve une profonde compassion pour les victimes dont il est fait mémoire ici. De même, elle se fait proche de tous ceux qui, aujourd’hui, sont l’objet de persécutions pour des raisons de race, de couleur, de condition de vie ou de religion – leurs souffrances sont les siennes, et sienne est leur espoir de justice. En tant qu’Évêque de Rome et Successeur de l’Apôtre Pierre, je réaffirme – comme mes prédécesseurs – l’engagement de l’Église à prier et à œuvrer sans cesse pour faire que cette haine ne règne plus jamais dans les cœurs des hommes. Le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob est le Dieu de la paix (cf. Ps 85, 9).

Les Écritures enseignent que nous avons le devoir de rappeler au monde que ce Dieu est vivant, même s’il nous est parfois difficile de comprendre ses voies mystérieuses et impénétrables. Il s’est révélé lui-même et il continue d’agir dans l’histoire humaine. Lui seul gouverne le monde avec justice et juge tous les peuples avec droiture (cf. Ps 9, 9).

En contemplant, à l’intérieur de ce mémorial, les visages qui se reflètent à la surface immobile de l’eau, on ne peut s’empêcher de se rappeler que chacun d’eux porte un nom. Je ne peux qu’imaginer la joyeuse attente de leurs parents alors qu’ils se préparaient avec impatience à accueillir la naissance de leurs enfants. Quel nom allons-nous donner à cet enfant ? Qu’adviendra-t-il de lui ou d’elle ? Qui pouvait imaginer qu’ils seraient condamnés à un sort aussi lamentable !

Alors que nous nous tenons ici en silence, leur cri résonne encore dans nos cœurs. C’est un cri élevé contre tout acte d’injustice et de violence. C’est le reproche perpétuel contre le sang versé innocent. C’est le cri d’Abel s’élevant de la terre vers le Tout-Puissant. Professant fermement notre foi en Dieu, nous apportons notre voix à ce cri en utilisant les mots du Livre des Lamentations, qui sont pleins de sens pour les Juifs comme pour les Chrétiens.

“Les faveurs du Seigneur ne sont pas finies, ni ses compassions épuisées ;

elles se renouvellent chaque matin, grande est sa fidélité !

Ma part, c’est Dieu ! dit mon âme, c’est pourquoi j’espère en lui.’

Le Seigneur est bon pour qui se fie à lui, pour l’âme qui le cherche.

Il est bon d’attendre en silence le salut du Seigneur” (Lm 3, 22-26).

Mes chers amis, je suis profondément reconnaissant envers Dieu et envers vous de cette occasion de me tenir ici en silence : un silence pour se souvenir, un silence pour prier, un silence pour espérer. »