MESSAGE
de Jacques MYARD
Membre Honoraire du Parlement
Maire de Maisons-Laffitte
Président du Cercle Nation et République
Le 9 MAI 2023
Allocution du 8 Mai 2023
La bataille de France de mai-juin 1940 fut une très grande bataille, une bataille formidable où 60 000 soldats français périrent au champ d’honneur, bataille perdue par l’incurie de l’Etat major français enfermé dans ses convictions stratégiques de 14-18, alors que les généraux allemands avaient compris les mutations stupéfiantes des blindés, tout comme un jeune colonel français Charles de Gaulle l’avait lui aussi compris, sans avoir pu en convaincre le haut commandement français.
La bataille de France est survenue après la drôle de guerre, alors que les Alliés avaient la supériorité militaire sur le Reich engagé en Pologne.
Le Généralissime Gamelin attend l’attaque allemande en Belgique et aux Pays-Bas.
Le 10 janvier 1940, un Messerschmitt Taifun s’écrase près de Malines sur Meuse en Belgique.
A bord, un officier allemand est porteur de documents ultra secrets du Plan jaune approuvé par Hitler qui annonce une attaque sur la Belgique et les Pays-Bas, pays neutres.
Le Roi des Belges Léopold III en informe Maurice Gamelin, sans dévoiler ses sources, Gamelin estime que c’est l’occasion de convaincre la Belgique de laisser les armées françaises pénétrer en Belgique.
Après de multiples péripéties, Léopold III refuse et réaffirme la neutralité de la Belgique.
Accusé de trahison, Léopold III abdiqua en 1951, le 16 juillet, après de fortes tensions.
Gamelin applique le plan Dyle-Breda, le 10 mai à 10h la 7ème armée française franchit la frontière franco-belge.
Les combats sont furieux les 15, 16 et 17 mai, le plan Dyle-Breda est un échec.
Le 17 mai le Colonel de Gaulle décide une contre-attaque à Montcornet dans l’Aisne, c’est un succès moral qui ne prospère pas sur le plan militaire, en raison de l’absence de couverture aérienne.
Les 10 et 12 mai 1940, au nord de Sedan, les Allemands traversent le massif forestier des Ardennes, jugé difficilement franchissable par l’Etat major français.
C’est là le plan de Erich von Manstein approuvé par Hitler en février : il s’agit de percer le front français entre deux secteurs de la ligne Maginot.
• Le secteur stricto sensu de la ligne Maginot, bien défendu.
• Et le secteur défensif des Ardennes avec des fortifications, insuffisantes.
L’Etat major français installé à Vincennes analyse mal la percée de Sedan, il a toujours les yeux fixés sur la Belgique et la manœuvre Dyle-Breda.
Le Blitzkrieg allemand prend à revers, en faucille les armées françaises et alliées, elles sont acculées à Dunkerque, les Anglais rembarquent.
Vichy signe l’armistice le 22 juin 1940.
La France est à genoux, vaincue, l’immense effort national de 14-18 est remis en cause, anéanti !
Les Français éprouvent alors le sentiment inexpliqué d’une « étrange défaite » fort bien décrite par Marc Bloch.
• Une « étrange défaite » imputable au seul commandement de l’Etat major enfermé à Vincennes, mais surtout dans ses conceptions obsolètes des stratégies de 14-18.
• Une « étrange défaite » des politiques qui refusèrent de comprendre, pour beaucoup de responsables, la vraie nature de Hitler, qui se moque du droit, mais exige de ses généraux d’être les plus forts pour vaincre, vae victis.
• Une « étrange défaite » mais glorieuse pour nos soldats qui ont combattu avec courage, pied à pied, détermination, face à un ennemi mieux armé.
La France est à genoux, mais nombreux sont les patriotes qui ne courbent pas la tête.
« Quand la société est dissoute, l’Homme est tout. » Lamartine
L’Homme est tout, oui l’Homme est tout !
« La défense de la France montait du plus profond de soi-même, non motivé, impératif, sans réplique. » Philippe Viannay
« Vos fils résistent victorieusement à l’armée allemande.
N’écoutez pas les paniquards...
Il faut que chacun soit à son poste, les élus et les fonctionnaires se doivent de donner l’exemple.
Je connais les qualités de patriotisme des populations de ce département.
J’ai confiance, nous vaincrons. »
Début juin 1940. Le Préfet d’Eure et Loire, Jean Moulin.
« En temps de guerre, celui qui ne se rend pas est mon homme, quel qu’il soit, d’où qu’il vienne et quel que soit son parti. Il ne se rend point. Celui qui se rend est mon ennemi. »
17 juin 1940 Edmond Michelet.
Alors vint de Londres, le 18 juin, un appel à la résistance, diffusé par la BBC, un appel d’un général nommé à titre provisoire, quasi inconnu, Charles de Gaulle.
« L’espérance doit-elle disparaître ?
La défaite est-elle définitive ? Non !
Cette guerre n’est pas tranchée par la bataille de France. Cette guerre est une guerre mondiale.
Quoi qu’il arrive, la flamme de la résistance française ne doit pas s’éteindre et ne s’éteindra pas. »
Les Panzer de la Wehrmacht défait l’armée française en Blitzkrieg.
Mais Hitler ne savait pas que la France a toujours eu des forces supérieures aux forces matérielles.
Elle bénéficie des forces spirituelles de son âme, qui surpassent le destin tragique de la nuit des malheurs, des sacrifices engendrés par une brutale occupation.
« La liberté, ce n’est pas seulement un bien dont on jouit, un capital dont on touche les intérêts, mais une réalité vivante que nous entretenons de notre substance et qui est animée d’un principe spirituel dont la source est notre âme. »
Georges Bernanos, août 1941 Le chemin de la croix des armes.
• Cette force d’âme, tous les hommes de l’Ile de Sein l’ont chevillée au cœur, ils gagnent tous l’Angleterre pour s’engager dans les forces françaises libres dès le 24 juin 1940.
• Pierre Mesmer et Jean Simon, après avoir entendu le discours d’un maréchal à la gloire perdue qui a décidé de déposer les armes, rallient Marseille, embarquent à bord du navire italien « Capo Olmo », ils s’en emparent et le déroutent avec l’équipage vers Liverpool, en juin 1940.
• Le Général Jean Simon que j’ai eu l’insigne honneur de connaître, avec lequel j’ai rallumé la flamme de l’Arc de Triomphe, me confia :
« Lorsque nous nous sommes présentés au Général de Gaulle à Londres, il nous demanda sans autres commentaires sur notre action, Dans quelle unité voulez-vous servir ? »
Fin de l’entretien.
Devant la gravité de la défaite, les Patriotes savaient au plus profond de leur âme qu’ « obéir » à Vichy c’est trahir, mais « Désobéir, c’est servir. Servir jusqu’au sacrifice. »
« Le convoi s’ébranle de la prison de Fresne à l’aube du 29 août 1941, en direction du Mont Valérien. Dans l’autocar...les condamnés assis sur leurs cercueils sont encadrés par des soldats de la Wehrmacht. Les condamnés descendent de l’autocar. Ils rejoignent l’abbé Stock, un prêtre catholique allemand, une dernière bénédiction. »
« Bekanntmachung, Avis
Le lieutenant de vaisseau, Henri Louis Honoré Comte d’Estienne d’Orves...
L’Agent commercial Maurice Charles Emile Barlier
Le commerçant Jean Louis Guillaume Doornik
ont été condamnés à mort à cause d’espionnage. Ils ont été fusillés aujourd’hui.
Paris 29 août 1941
« Der Miltärbefehlshaber in Frankreich. »
(Le commandement militaire allemand en France)
Ernst Jünger, l’auteur d’Orage d’acier, prit connaissance des lettres d’Adieu du Comte d’Estienne d’Orves. Il note dans son journal parisien :
« Ces lettres constituent une lecture de haute valeur et j’avais le sentiment de tenir entre mes mains un document qui demeurera. »
Ils sont plus d’un millier à avoir connu leur destin tragique dans la clairière du Mont Valérien,
Ils sont des milliers à être tombés sous les balles de l’occupant, au combat dans les maquis, le Vercors, les Côtières l’Ain,
En représailles, victimes innocentes, choisis au hasard, fusillés de Chateaubriand ou massacrés à Oradour-sur-Glane.
Résistants de l’intérieur, ils ont sauvé l’honneur de la France, avec les combattants des Forces Françaises Libres, en Syrie en 1941, à Koufra le 31 janvier 1941, à Bir Hakeim en juin 1942, en Libye.
Ces « hommes, ces FFL, partis de rien » dit d’eux René Cassin, ont rappelé au monde la valeur des soldats français.
Ils ont rallié à eux les hommes de toute origine de l’Empire colonial français.
Le 26 août 1940 à Fort Lamy au Tchad, Félix Eboué, Gouverneur du Tchad, avec le Colonel Pierre Marchand proclame son ralliement à de Gaulle.
« Cet homme d’intelligence et de cœur, ce noir ardemment français, répugnait de tout son être à la soumission de la France au triomphe du racisme nazi. » Charles de Gaulle
Félix Eboué est la preuve historique que la France coloniale n’a pas commis de crime contre l’Humanité.
Félix Eboué entre au Panthéon le 20 mai 1949 en compagnie de Victor Schoelcher.
Résistants de l’intérieur, combattants des FFL sont du même sang.
A Koufra, les FFL sous le commandement du Colonel Leclerc font le serment, le 2 mars 1941
« Jurez de ne déposer les armes que lorsque nos couleurs, nos belles couleurs, flotteront sur la cathédrale de Strasbourg. »
Le 24 novembre 1944 le Général Leclerc signe l’ordre du jour n°73
« Le serment de Koufra est tenu...Vous avez chassé l’envahisseur de la capitale de l’Alsace rendant ainsi à la France et à son armée son prestige d’hier. Nos camarades tombés sont morts en héros.
Honorons leur mémoire.
Strasbourg 24 novembre 1944. »
Le 9 mai 1945, le Général de Lattre de Tassigny cosigne à Berlin la reddition des Armées allemandes avec nos Alliés américains, anglais et russes, au grand dam du Général nazi Wilhelm Keitel.
L’« étrange défaite » fut alors oubliée dans l’enthousiasme de la fin de la guerre.
L’« étrange défaite » expiée par les sacrifices qui ne parviennent pas à effacer les douleurs des pères, des mères, disparus, tombés sous les balles de l’occupant.
L’« étrange défaite » taraude toujours notre mémoire collective.
L’« étrange défaite » nous revient lancinante à l’esprit, elle nous rappelle l’incurie des chefs :
« Il ne nous manque pas un bouton de guêtre » Edmond le Bœuf Ministre de la Guerre 1870
« Août 1914, c’est le temps des moissons, la guerre sera rapide.
Nous ne sommes pas disposés à laisser Strasbourg sous le feu des canons allemands »
Albert Sarraut 7 mars 1936, à la suite de la remilitarisation de la Rive Gauche du Rhin, la Rhénanie.
« Le croquemitaine se dégonflera. » Paul Claudel le 14 août 1939, la veille de l’agression nazie sur la Pologne.
« Nous vaincrons parce que nous sommes les plus forts. » Paul Reynaud 10 septembre 1939.
Ces déclarations de nos chefs sont pour toujours gravées dans nos mémoires, elles sonnent en avertissement, dénonçant les illusions des naïfs.
Seul Winston Churchill a tenu le langage de la vérité, le 13 mai 1940, aux Communes
« Je n’ai rien d’autre à offrir que du sang, du labeur, des larmes et de la sueur. »
Nous savons que l’Histoire est à jamais tragique.
Pourquoi alors avoir accepté d’engranger les prétendues, les illusoires dividendes de la Paix ?
Engranger les dividendes de la Paix, c’est désarmer la Nation.
Engranger les dividendes de la Paix rappelle le goût amer de l’inéluctable « étrange défaite. »
L’Histoire n’est jamais un long fleuve tranquille, l’Histoire exige plus que jamais lucidité, détermination et efforts.
« Si vis Pacem, Para bellum »
demeure la loi de la Raison pour assurer l’indépendance nationale, notre liberté.
Vive nos Héros tombés au champ d’honneur
Vive nos Alliés
Vive la République
Vive la France.
Jacques Myard
Maire de Maisons-Laffitte
Membre Honoraire du Parlement
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