PIE IX
Lettre encyclique Quanta Cura
À tous nos Vénérables Frères les Patriarches, Primats, Archevêques et Évêques, en grâce et communion avec le Siècle Apostolique.
8 décembre 1854
Condamnation de la liberté religieuse
20 minutes
Magistère Encyclique Quanta cura
Donné à Rome, près Saint-Pierre, le 8 décembre 1864
Pie IX, Pape
Vénérables Frères, Salut et Bénédiction Apostolique.
1. Avec quel soin et quelle vigilance pastorale les Pontifes Romains Nos Prédécesseurs, ont rempli la mission à eux confiée par le Christ Seigneur lui-même en la personne du Bienheureux Pierre, Prince des Apôtres, et ont ainsi accompli leur devoir de paître les agneaux et les brebis ! Sans jamais discontinuer, ont attentivement nourri tout le troupeau du Seigneur des paroles de la foi, ont imprégné de la doctrine de salut, écarté des pâturages empoisonnés, voilà ce dont tout le monde est convaincu et assuré, Vous surtout, Vénérables Frères. Oui vraiment Nos Prédécesseurs se montrèrent les défenseurs et les vengeurs de l’auguste religion catholique, de la vérité et de la justice : soucieux, avant tout, du salut des âmes, ils n’ont jamais rien eu de plus à coeur que de découvrir et de condamner par leurs très sages Lettres et Constitutions toutes les hérésies et les erreurs qui, contraires à notre Foi divine, à la doctrine de l’Église Catholique, à l’honnêteté des mœurs et au salut éternel des hommes, ont fréquemment soulevé de violentes tempêtes et lamentablement souillé l’Église et la Cité.
2. C’est pourquoi Nos mêmes Prédécesseurs ont constamment opposé la fermeté Apostolique aux machinations criminelles d’hommes iniques, qui projettent l’écume de leurs désordres comme les vagues d’une mer en furie et promettent la liberté, eux, les esclaves de la corruption : ébranler les fondements de la religion catholique et de la société civile par leurs fausses opinions et les plus pernicieux écrits, faire disparaître toute trace de vertu et de justice, corrompre les âmes et les esprits, détourner des justes principes de la morale ceux qui ne sont pas sur leurs gardes, en particulier la jeunesse inexpérimentée, la dépraver pitoyablement, l’entraîner dans les pièges de l’erreur, et enfin l’arracher du sein de l’Église catholique, voilà le sens de tous leurs efforts.
3. Vous êtes les premiers à savoir, Vénérables Frères, qu’à peine avions-Nous été élevé à cette chaire de Pierre, par un secret dessein de la Providence Divine et sans aucun mérite de Notre part, Nous avons vu pour la plus grande douleur de Notre âme une tempête vraiment effroyable soulevée par tant de doctrines perverses. Nous avons vu les maux les plus accablants, qu’on ne déplorera jamais assez et que tant d’erreurs ont attirés sur le peuple chrétien. C’est pour remplir les devoirs de Notre Ministère Apostolique et suivre les traces glorieuses de Nos Prédécesseurs que Nous avons élevé la voix. En plusieurs Encycliques déjà publiées, dans les Allocutions prononcées en consistoire et en d’autres Lettres Apostoliques, Nous avons condamné les principales erreurs de notre bien triste époque, fait appel à votre haute vigilance épiscopale, averti et encouragé tous Nos très chers fils de l’Église Catholique à fuir et redouter la contagion d’une peste si violente. Et en particulier, par Notre première Encyclique du 9 novembre 1846, à Vous, adressée, et les deux allocutions prononcées en consistoire le 9 décembre 1854 et le 9 juin 1862, nous avons condamné ces monstruosités extraordinaires que sont les opinions, qui surtout de nos jours, dominent pour le plus grand dommage des âmes et au détriment de la société civile elle-même. Ces opinions s’opposent essentiellement, non seulement à l’Église catholique, à sa doctrine de salut et à ses droits vénérables, mais encore à l’éternelle loi naturelle gravée par Dieu dans tous les cœurs et à la droite raison. C’est d’elles que presque toutes les autres erreurs firent leur origine.
4. Cependant, bien que nous n’ayons pas négligé de proscrire et de réprouver fréquemment les plus graves de ces erreurs, la cause de l’Église catholique et le salut des âmes que Dieu nous a confié, et le bien de la société humaine elle-même, réclament impérieusement que Nous lancions un nouvel appel à votre sollicitude pastorale pour terrasser d’autres idées fausses qui découlent de source de ces mêmes erreurs. Ces opinions trompeuses et perverses sont d’autant plus détestables qu’elles visent principalement à entraver et renverser cette puissance de salut que l’Église catholique, en vertu de la mission et du mandat reçu de son divin Auteur, doit exercer librement jusqu’à la consommation des siècles, non moins à l’égard des individus que des nations, des peuples et de leurs chefs. Elles cherchent à faire disparaître cette mutuelle alliance et cette concorde entre le Sacerdoce et l’Empire, qui s’est toujours avérée propice et salutaire à la Religion et à la société [1].
5. Et de fait, vous le savez parfaitement, Vénérables Frères, il s’en trouve beaucoup aujourd’hui pour appliquer à la société civile le principe impie et absurde du « naturalisme », comme ils l’appellent, et pour oser enseigner que « le meilleur régime politique et le progrès de la vie civile exigent absolument que la société humaine soit constituée et gouvernée sans plus tenir compte de la Religion que si elle n’existait pas, ou du moins sans faire aucune différence entre la vraie et les fausses religions ». Et contre la doctrine de la Sainte Écriture, de l’Église et des saints Pères, ils affirment sans hésitation que : « la meilleure condition de la société est celle où on ne reconnaît pas au pouvoir le devoir de réprimer par des peines légales les violations de la loi catholique, si ce n’est dans la mesure où la tranquillité publique le demande ». À partir de cette idée tout à fait fausse du gouvernement des sociétés, ils ne craignent pas de soutenir cette opinion erronée, funeste au maximum pour l’Église catholique et le salut des âmes, que Notre Prédécesseur Grégoire XVI, d’heureuse mémoire, qualifiait de « délire » [2] : « La liberté de conscience et des cultes est un droit propre à chaque homme. Ce droit doit être proclamé et garanti par la loi dans toute société bien organisée. Les citoyens ont droit à l’entière liberté de manifester hautement et publiquement leurs opinions quelles qu’elles soient, par les moyens de la parole, de l’imprimé ou tout autre méthode sans que l’autorité civile ni ecclésiastique puisse lui imposer une limite ». Or, en donnant pour certitudes des opinions hasardeuses, ils ne pensent ni ne se rendent compte qu’ils prêchent « la liberté de perdition » [3], et que « s’il est permis à toutes les convictions humaines de décider de tout librement, il n’en manquera jamais pour oser résister à la vérité et faire confiance au verbiage d’une sagesse toute humaine. On sait cependant combien la foi et la sagesse chrétienne doivent éviter cette vanité si dommageable, selon l’enseignement même de Notre Seigneur Jésus-Christ » [4].
6. Là où la religion a été mise à l’écart de la société civile, la doctrine et l’autorité de la révélation divine répudiées, la pure notion même de la justice et du droit humain s’obscurcit et se perd, et la force matérielle prend la place de la véritable justice et du droit légitime. D’où l’on voit clairement pourquoi certains, reléguant au dernier rang les plus sûrs principes de la saine raison, sans en tenir compte, osent proclamer que : « La volonté du peuple qui se manifeste par ce qu’on dit être l’opinion publique, ou autrement, constitue la loi suprême dégagée de tout droit divin et humain, et que dans l’ordre politique des faits accomplis, par cela même qu’ils sont accomplis, ont force de droit. »
7. Mais qui ne voit et ne sent parfaitement qu’une société dégagée des liens de la religion et de la vraie justice, ne peut plus se proposer aucun autre but que d’amasser et d’accumuler des richesses, ni suivre d’autre loi dans ses actes que l’indomptable désir de l’âme d’être esclave de ses propres passions et intérêts ? C’est pourquoi les hommes de cette espèce poursuivent d’une haine si cruelle les Familles Religieuses, en dépit des services rendus au prix des plus grands efforts à la religion chrétienne, à la société civile et à la culture ; ils déblatèrent contre elle en disant qu’elles n’ont aucune raison légitime d’exister, et c’est ainsi qu’ils applaudissent aux divagations des hérétiques. Or, comme l’enseignait en toute sagesse Notre Prédécesseur Pie VI d’heureuse mémoire : « l’abolition des réguliers blesse le droit de professer publiquement les conseils évangéliques, blesse un mode de vie recommandé dans l’Église comme conforme à la doctrine des Apôtres, blesse la mémoire de ces illustres fondateurs que nous vénérons sur les autels, et qui n’ont établi ces ordres que sous l’inspiration de Dieu ».
8. Et ils déclarent même dans leur impiété qu’il faut ôter aux citoyens et à l’Église la faculté « de fournir valablement des aumônes publiques par charité chrétienne », et abolir la loi « qui à des jours déterminés défend les œuvres serviles pour vaquer au culte divin » sous le prétexte si fallacieux que « la faculté et la loi ci-dessus évoquées sont contraires aux principes de la bonne économie politique ».
9. Et non contents de mettre la religion à l’écart de la société, ils veulent même l’écarter de la vie privée des familles. En effet, enseignant et professant la si funeste erreur du Communisme et du Socialisme, ils affirment que : « La société domestique ou la famille emprunte au seul droit civil toute sa raison d’être ; et qu’en conséquence c’est de la loi civile seule que découlent et dépendent tous les droits des parents sur les enfants, et d’abord le droit d’instruction et d’éducation. » Par ces opinions impies et ces machinations, ces hommes de mensonge veulent surtout aboutir à ce que la doctrine et le pouvoir de l’Église catholique qui apportent le salut, soient entièrement éliminés de l’instruction et de l’éducation de la jeunesse, et que l’âme tendre et malléable des jeunes soit infectée et déformée pitoyablement par toutes sortes d’erreurs perverses et par le vice. Oui, tous ceux qui ont mis leurs efforts à bouleverser l’ordre sacré et l’ordre public, à renverser l’ordre juste de la société, et à anéantir tous les droits divins et humains, ont toujours fait tendre leurs desseins criminels, leurs désirs et leurs œuvres principalement à tromper et à dépraver la jeunesse qui ne s’y attend pas, comme Nous l’avons indiqué plus haut ; et ils ont mis tout leur espoir dans la corruption de cette jeunesse.
10. Voilà pourquoi jamais ils ne cessent d’infliger toutes sortes de vexations indicibles à l’un et l’autre clergé d’où rejaillirent tant d’immenses bienfaits sur l’ordre religieux, civil et culturel, comme l’attestent avec éclat les plus sûrs monuments de l’histoire ; voilà pourquoi ils déclarent que ce clergé même, en tant qu’ennemi du véritable et utile progrès de la science et de la civilisation, doit être écarté de toute charge et de tout rôle dans l’instruction et l’éducation de la jeunesse.
11. Mais il en est d’autres qui, renouvelant les chimères extravagantes et tant de fois condamnées des novateurs, ont l’insigne impudence de soumettre à la discrétion de l’autorité civile l’autorité suprême attribuée par le Christ Notre Seigneur à l’Église et à ce Siège Apostolique, et de dénier à cette même Église et à ce Siège tous droits en ce qui regarde les affaires extérieures. Car ils n’ont aucunement honte d’affirmer que : « Les lois de l’Église n’obligent pas en conscience, à moins qu’elles ne soient promulguées par le pouvoir civil. – Les actes et les décrets des Pontifes Romains concernant la religion et l’Église ont besoin de la sanction et de l’approbation, ou au moins du consentement du pouvoir civil. – Les constitutions apostoliques qui condamnent les sociétés secrètes – qu’on y exige ou non le serment de garder le secret – et qui frappent d’anathème leurs adeptes et leurs défenseurs ne peuvent entrer en vigueur dans les pays où le gouvernement civil tolère ces sortes d’associations. – L’excommunication portée par le Concile de Trente et les Pontifes Romains contre ceux qui envahissent et usurpent les droits et possessions de l’Église, repose sur une confusion de l’ordre spirituel avec l’ordre civil et politique, et n’a pour but qu’un bien de ce monde. – L’Église ne doit rien décréter qui puisse lier la conscience des fidèles relativement à l’usage des biens temporels. Le droit ecclésiastique n’a pas compétence pour châtier de peines temporelles les violateurs de ses lois. – Il est conforme aux principes de la sacrée théologie et du droit public d’attribuer au gouvernement civil et de revendiquer pour lui la propriété des biens qui sont en possession de l’Église, des Familles Religieuses et autres associations pieuses ».
12. Ils ne rougissent pas non plus de professer ouvertement et publiquement les formules et les principes hérétiques, d’où sortent tant d’opinions perverses et d’erreurs. Car ils répètent que « le pouvoir ecclésiastique n’est pas, de droit divin, distinct et indépendant du pouvoir civil, et qu’une telle distinction et indépendance ne peut être conservée sans que l’Église envahisse et usurpe les droits essentiels du pouvoir civil ».
13. Et Nous ne pouvons passer sous silence l’audace de ceux qui, ne supportant pas la saine doctrine, prétendent que : « Quant à ces jugements et à ces décrets du Siège Apostolique dont l’objet regarde manifestement le bien général de l’Église, ses droits et sa discipline, on peut, du moment qu’ils ne touchent pas aux dogmes relatifs à la foi et aux mœurs, leur refuser l’assentiment et l’obéissance, sans péché et sans cesser en rien de professer le catholicisme. » À quel point cela est contraire au dogme catholique sur le plein pouvoir, divinement conféré par le Christ Notre Seigneur lui-même au Pontife Romain, de paître, de régir et de gouverner l’Église universelle, il n’est personne qui ne le voie et qui ne le comprenne clairement et distinctement.
14. Au milieu donc d’un telle perversité d’opinions corrompues, Nous souvenant de Notre charge Apostolique, dans notre plus vive sollicitude pour notre très sainte religion, pour la saine doctrine, et pour le salut des âmes à Nous confiées par Dieu et pour le bien de la société humaine elle-même, Nous avons jugé bon d’élever à nouveau Notre Voix Apostolique. En conséquence, toutes et chacune des opinions déréglées et des doctrines rappelées en détail dans ces Lettres, Nous les réprouvons, proscrivons et condamnons de Notre Autorité Apostolique ; et Nous voulons et ordonnons que tous les fils de l’Église catholique les tiennent absolument pour réprouvées, proscrites et condamnées.
15. Et, en outre, vous savez très bien, Vénérables Frères, que de nos jours ceux qui haïssent toute vérité et toute justice, les ennemis acharnés de notre religion, au moyen de livres empoisonnés, de brochures et de journaux répandus par toute la terre, trompent les peuples, mentent perfidement, et diffusent toutes sortes d’autres doctrines impies. Vous n’ignorez pas non plus que, même à cette époque où nous sommes, on en trouve qui, mus et stimulés par l’esprit de Satan, en sont arrivés à cette impiété de nier Notre Seigneur et Maître Jésus-Christ, et ne craignent pas d’attaquer sa Divinité avec une insolence criminelle. Mais ici Nous ne pouvons, Vénérables Frères, que vous honorer à bon droit des plus grands éloges, vous qui n’avez jamais manqué, avec tout votre zèle, d’élever votre voix épiscopale contre tant d’impiété.
16. C’est pourquoi, par Nos présentes Lettres, Nous nous adressons une fois de plus avec beaucoup d’affection à vous qui, appelés à partager Nos soucis, êtes au milieu des calamités qui nous touchent si virement. Notre consolation, Notre joie et Notre encouragement les plus grands : par la qualité de votre esprit religieux et de votre piété et aussi par cet amour, cette foi et cette déférence admirable avec lesquels, attachés à Nous et à ce Siège Apostolique dans la plus grande unité d’esprit, vous travaillez à remplir avec empressement et application votre très grave ministère épiscopal. Car Nous attendons de votre remarquable zèle pastoral que, prenant le glaive de l’esprit, qui est la parole de Dieu, et fortifiés dans la grâce de notre Seigneur Jésus-Christ, vous ayez la volonté de veiller chaque jour davantage avec une attention redoublée à ce que les fidèles confiés à vos soins « s’abstiennent des herbes nuisibles que Jésus-Christ ne cultive pas, parce qu’elles n’ont pas été plantées par son Père » [5]. Et ne cessez jamais d’inculquer à ces mêmes fidèles que tout vrai bonheur découle pour les hommes de notre sainte religion, de sa doctrine et de sa pratique, et qu” »heureux est le peuple dont Dieu est le Seigneur » [6]. Enseignez que « l’autorité repose sur le fondement de la Foi Catholique » [7] et qu” »il n’y a rien de plus mortel, rien qui nous précipite autant dans le malheur, nous expose autant à tous les dangers, que de penser qu’il nous peut suffire d’avoir reçu le libre arbitre en naissant ; sans avoir à rien demander de plus à Dieu ; c’est-à-dire, qu’oubliant notre Créateur, nous renions son pouvoir sur nous pour manifester notre liberté » [8]. N’omettez pas non plus d’enseigner que « le pouvoir de gouverner est conféré non pour le seul gouvernement de ce monde, mais avant tout pour la protection de l’Église » [9] et que rien ne peut être plus profitable et plus glorieux aux chefs d’États et aux Rois que ce que Notre Prédécesseur saint Félix, rempli de sagesse et de courage, écrivait à l’empereur Zénon : « Qu’ils laissent l’Église catholique se gouverner par ses propres lois, et ne permettent à personne de mettre obstacle à sa liberté… Il est certain qu’il leur est avantageux de s’appliquer, quand il s’agit de la cause de Dieu, et suivant l’ordre qu’Il a établi, à subordonner et non à préférer la volonté royale à celle des prêtres du Christ » [10].
17. C’est toujours, Vénérables Frères, mais c’est maintenant plus que jamais, au milieu de telles calamités de l’Église et de la société civile, en présence d’une si vaste conspiration d’adversaires et d’un tel amas d’erreurs contre le catholicisme et le Siège Apostolique, qu’il est absolument nécessaire de nous adresser avec confiance au Trône de la grâce pour obtenir miséricorde et trouver la grâce d’une protection opportune.
À cette fin, Nous avons jugé bon de stimuler la piété de tous les fidèles pour qu’en union avec Nous, et avec vous, ils ne cessent de prier et supplier par les prières les plus ferventes et les plus humbles, le Père très clément des lumières et des miséricordes ; qu’ils se réfugient toujours dans la plénitude de la foi auprès de notre Seigneur Jésus-Christ, qui nous a rachetés à Dieu en son sang ; qu’ils demandent avec une perpétuelle instance à son très doux Cœur, victime de sa très ardente charité envers nous, d’attirer tout à lui par les liens de son amour, et de faire que tous les hommes, enflammés de son très saint amour, marchent dignement selon son Cœur, agréables à Dieu en tout, portant des fruits en toutes sortes de bonnes œuvres. Et, comme les prières des hommes sont indubitablement plus agréables à Dieu quand elles lui parviennent avec des cœurs purs de toute corruption, Nous avons pensé à ouvrir avec une libéralité apostolique aux fidèles chrétiens les célèbres trésors de l’Église dont la distribution Nous est confiée, afin que ces mêmes fidèles excités plus vivement à la vraie piété, et purifiés des taches de leurs péchés par le Sacrement de Pénitence, répandent avec plus de confiance leurs prières à Dieu et obtiennent sa miséricorde et sa grâce.
18. En conséquence, par les présentes Lettres, en vertu de notre Autorité Apostolique, à tous et chacun des fidèles des deux sexes dans l’univers catholique, Nous accordons une Indulgence plénière en forme de Jubilé, à gagner durant toute l’année à venir 1865 et non au delà, dans l’espace d’un mois à désigner par vous, Vénérables Frères, et les autres Ordinaires légitimes des lieux, en la même manière et forme exactement que Nous l’avons accordée, au commencement de Notre suprême Pontificat, par Nos Lettres Apostoliques en forme de Bref du 20 novembre 1846, envoyée à tout votre Ordre épiscopal de l’univers, et commençant par ces mots : « Arcano Divinae Providentiae consilio » et avec tous les mêmes pouvoirs accordés par Nous dans ces Lettres. Nous voulons cependant que toutes les prescriptions contenues dans les susdites lettres soient observées, et que soient maintenues toutes les exceptions que Nous avons mentionnées. Nous accordons cela nonobstant toutes dispositions contraires, même celles qui seraient dignes d’une mention et d’une dérogation spéciales et individuelles. Et pour écarter tout doute et toute difficulté, Nous vous avons fait parvenir un exemplaire de ces Lettres.
19. Prions, Vénérables Frères, « du fond du cœur et de toute notre âme la miséricorde de Dieu, parce qu’il a lui-même ajouté : Je n’éloignerai pas d’eux ma miséricorde. Demandons et nous recevrons, et si nous attendons et que nous tardions à recevoir à cause de la gravité de nos offenses, frappons ; car à celui qui frappe on ouvrira, pourvu que nous frappions à la porte avec nos prières, nos gémissements et nos larmes, avec lesquels il faut insister et persévérer, et pourvu que notre prière soit unanime… que chacun prie Dieu non seulement pour lui-même mais pour tous ses frères, comme le Seigneur nous a enseigné à prier » (11). Et pour que Dieu exauce plus facilement Nos prières et Nos vœux, les vôtres et ceux de tous les fidèles, faisons participer en toute confiance auprès de lui l’Immaculée et très sainte Mère de Dieu, la Vierge Marie qui a détruit toutes les hérésies dans le monde entier, et qui, Notre Mère très aimante à tous, « est toute suave… et pleine de miséricorde… se montre exorable à tous, très clémente à tous, compatit aux misères de tous avec la plus large affection » [11]. Comme Reine, debout à la droite de Son Fils Unique, notre Seigneur Jésus-Christ, toute enveloppée dans un vêtement d’or, il n’y a rien qu’Elle ne puisse obtenir de Lui.
Demandons aussi les suffrages du Bienheureux Pierre, Prince des Apôtres, de son Coapôtre Paul, et de tous les Saints du Ciel qui devenus amis de Dieu, sont parvenus au royaume céleste, possèdent la couronne et la palme, et sûrs de leur immortalité, sont soucieux de notre salut.
20. Enfin, demandant pour vous à Dieu de toute Notre âme l’abondance de tous les dons célestes, Nous donnons du fond du cœur et avec amour, en gage de Notre particulière affection, la Bénédiction Apostolique à vous-mêmes, Vénérables Frères, et à tous les fidèles clercs et laïcs confiés à vos soins.
Donné à Rome, près Saint-Pierre, le 8 décembre de l’année 1864, dixième depuis la Définition Dogmatique de l’Immaculée Conception de la Vierge Marie Mère de Dieu. Et de Notre Pontificat la dix-neuvième.
PIE IX, Pape
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