Un de ces traits qui nous caractérise, nous Israéliens, est notre enclin systématique à nous lamenter de la situation, qu'on appelle ici "hamatsav", qui est toujours ''difficile, inquiétante, noire, catastrophique ou apocalyptique'' selon le degré de notre paranoïa. D'ailleurs, notre lieu le plus sacré n'est-il pas le ''mur des Lamentations'', qu'on préfère, heureusement appeler aujourd'hui ''Kotel'' ou ''mur Occidental''?
La situation d'Israël à l'aube de l'année 2012, est-elle plus désespérée qu'en 1948, qu'en 1967 ou même qu'en 1973 ? J'aurais plutôt tendance à voir les trois quarts pleins que le quart vide du verre.
L'année 2011 a vu l'émergence d'une vague de fond islamiste dans plusieurs pays arabes, là où les puissances occidentales, avec leur naïveté coutumière, s'attendaient à l'avènement de la démocratie. Mais en quoi ce bouleversement affecte-t-il Israël?
Nous avons tiré les enseignements de nos lacunes lors de la deuxième guerre du Liban, nous sommes prêts à faire face à toute éventualité.
Un Maroc ou une Tunisie islamistes ne changent rien pour Israël, sauf pour les quelques touristes, Israéliens ou Juifs français, dont on se demande franchement ce qu'ils ont encore à faire dans ces pays. La Libye islamiste ou kadhafiste, tout comme une Algérie qui connaîtra, à moyen terme, le sort de ses voisins, c'est "bonnet blanc ou blanc bonnet".
Quant à l'Egypte, où les Frères musulmans sortiront probablement vainqueurs des élections législatives, si nous devons, bien évidemment, faire preuve de la plus grande vigilance, elle ne constitue pas véritablement, dans un proche avenir, une menace pour notre pays. En effet, les militaires, qui ont d'excellents contacts avec Israël, ne laisseront pas si vite le pouvoir leur échapper. Ils délégueront au futur gouvernement islamiste toute la partie économique et sociale du pays, se réservant la Défense et les Affaires étrangères.
Ce scénario devrait apaiser les Occidentaux et les Etats-Unis en particulier, qui, ne l'oublions pas, versent annuellement 1,3 milliard d'aide militaire, plus 1,9 milliard de dollars au titre de la coopération militaire égypto-américaine et 800 millions de dollars de soutien à l'économie. Et les Egyptiens attendent cet argent comme une assistance respiratoire, d'autant qu'une situation instable chronique nuirait au tourisme, la principale source de revenus du pays.
Donc les problèmes de l'Egypte sont tellement énormes, qu'elle ne se risquera pas dans une aventure militaire contre Israël, au risque de perdre les précieux dollars.
Le chaos syrien pourrait nous être favorable au bout du compte, non pas qu'il y ait quoi que ce soit à espérer des opposants syriens au président Assad. Ils sont, eux aussi, islamistes et leur détestation d'Israël n'est pas moindre que celle du dictateur en place. Mais le soutien inébranlable du Hezbollah chiite et du gouvernement libanais au boucher syrien laissera des traces lorsque ce dernier aura été renversé par les islamistes sunnites. Ainsi, le Hezbollah ne pourra plus compter sur Damas comme base arrière.
Le mouvement terroriste chiite libanais est actuellement en position de faiblesse, on l'a d'ailleurs constaté cette semaine, après les tirs de 4 roquettes sur Israël à partir du Sud-Liban. On a noté l'empressement du Hezbollah à déclarer qu'il n'était pour rien dans cette action, lui qui se veut à la pointe du combat contre "l'entité sioniste". Une preuve aussi qu'il ne contrôle plus aussi bien qu'avant le sud du Liban.
Par contre, nous devons faire davantage d'efforts pour soutenir la monarchie hachémite. Il faut à tout prix éviter, pour la stabilité de la région, que la Jordanie ne tombe aux mains d'un pouvoir islamiste.
Quant à l'initiative palestinienne à l'Onu, elle se révèle être, une fois de plus, un gros pétard mouillé.
L'Autorité palestinienne a enregistré un nouvel échec, en dépit de ses déclarations tonitruantes. Une victoire indéniable pour Israël qui répète à longueur de journée que la seule voie pour aboutir à la paix et à la reconnaissance de deux Etats pour deux Peuples, est celle des pourparlers directs. Et pour ceux qui ergoteront en évoquant la reconnaissance des Palestiniens par l'Unesco, je répondrai que cette institution s'est discréditée encore un peu plus tout en s'autoasphyxiant après la suspension de l'aide américaine.
J'ai évoqué, la semaine dernière, le compte à rebours iranien. Les évènements de cette semaine tendent à me donner raison après une nouvelle explosion "mystérieuse" à Ispahan et la mise à sac de l'ambassade britannique de Téhéran. Je me suis d'ailleurs senti un peu "humilié", car les manifestants ont brûlé les drapeaux des deux "grands Satan", américain et anglais et du "petit Satan israélien". Je ne vois pas pourquoi Israël ne serait que le "petit" Satan, alors que nous sommes accusés de tous les maux du monde.
Je revendique donc pour mon pays le titre de "grand" Satan. Car nous sommes prêts, la question est de savoir combien de temps les deux autres "grands Satan" vont encore attendre. A ce rythme, il sera difficile de tenir jusqu'aux élections américaines de novembre 2012.
Mais si Israël n'est pas complètement à l'abri du danger, notre pays doit affronter d'autres défis au moins aussi importants que notre situation sécuritaire dont nous avons vu qu'elle n'est absolument pas désespérée.
Il m'est insupportable d'accepter que 10% de mes concitoyens ont eu faim en 2010. Voilà une situation intolérable à laquelle notre gouvernement se doit d'apporter une réponse immédiate. Dans un pays dont les responsables politiques ont réussi jusqu'à présent à nous épargner la crise économique qui frappe l'Europe, où les revenus de certains dirigeants d'entreprise sont obscènes par rapport au salaire horaire des médecins hospitaliers, où les jeunes parlent "logement" et l'Etat répond "immobilier", il nous faut mettre l'accent sur plus de justice sociale et plus d'éducation pour l'avenir de nos enfants. Voilà où se situe le véritable combat sioniste d'aujourd'hui.
Arrêtons la paranoïa existentielle, contentons-nous d'appliquer la simple équation suivante :
Judaïsme + Sionisme = optimisme = Israël qui gagne.
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