Contrairement à ce qu’affirmait François Mitterrand dans les années 1990, nous n’avons pas tout essayé contre le chômage. En la matière, je pense que la cause du chômage est triple : il y a ceux qui ne peuvent pas trouver d’emploi, ceux qui ne veulent pas trouver d’emploi et ceux qui ne savent pas trouver d’emploi. Pour ceux qui ne peuvent pas trouver d’emploi, parce que la croissance est mauvaise, il convient de mettre en place des réformes structurelles afin de soutenir la croissance de long terme ; pour les autres, il convient d’ores et déjà de prendre des mesures d’urgence, qui touchent au régime de l’indemnisation du chômage, au droit du travail et à la politique de formation.
Voici mes quatre propositions pour enrayer le chômage à court terme.
1. Moduler les indemnités du chômage en fonction de l’employabilité des demandeurs d’emploi
Il s’agit de mettre fin à l’absurdité du principe de non différenciation des allocataires de l’indemnité du chômage. Parce que nous ne sommes pas égaux devant le chômage, nous ne pouvons rester égaux devant son indemnisation.
Dans mon esprit, le versement des indemnités du chômage devrait en effet être modulé en fonction de l’employabilité des demandeurs d’emploi. Un homme de 30 ans, diplômé, demeurant en Ile de France, ne devrait pas être indemnisé de la même manière qu’un homme de 50 ans, sans diplôme, demeurant dans un bassin désindustrialisé. L’indemnité ne peut être la même dès lors que le préjudice n’est pas le même.
Je propose donc de distinguer les demandeurs d’emploi en fonction de plusieurs critères, définis en concertation avec les partenaires sociaux et qui affecteraient à chaque demandeur d’emploi un indice d’employabilité. Cet indice servirait ensuite à calculer la durée d’indemnisation du chômage qui irait, par exemple, de six mois pour une personne dont l’employabilité est très forte, à dix-huit mois pour une personne dont l’employabilité est très faible.
J’ajoute que, dans mon esprit, l’indice d’employabilité ne doit déterminer que la durée du versement de l’allocation chômage et non le taux de l’allocation chômage.
2. Ouvrir le droit aux indemnités du chômage après une rupture du contrat de travail du fait du salarié
L’idée est la suivante : le salarié qui démissionne aurait droit aux indemnités du chômage. Pour cela, il doit avoir passé au moins deux ans dans l’entreprise, auquel cas il aurait droit à une allocation chômage équivalente à 100% de son salaire pour une durée fixée à un mois par année passée dans l’entreprise dans la limite de six mois.
Il peut paraître étonnant, voire contradictoire, de vouloir lutter contre le chômage en permettant au salarié de quitter plus facilement l’emploi qu’il occupe, mais la contradiction n’est qu’apparente.
En effet, je suis convaincu que cette mesure sera en réalité très peu utilisée, mais elle permettra au salarié d’exercer une pression positive sur son employeur qui, craignant de voir le salarié quitter l’entreprise, consentira à davantage d’efforts en matière salariale.
Cette modification des relations entre l’employeur et le salarié, qui interviendrait sur le marché du travail, aurait ainsi des conséquences sur le marché des biens et des services par l’augmentation de la demande globale via l’augmentation du pouvoir d’achat des travailleurs. Cela entraînerait inévitablement une diminution du chômage.
Surtout, cela libérerait intellectuellement et moralement de nombreux salariés à qui l’on permettrait de prendre en mains leur destin.
3. Créer les Centres Municipaux de la Recherche d’Emploi Encadrée et à Temps Plein
Il s’agit de confier aux communes deux compétences supplémentaires : le placement des chômeurs dans l’emploi et le versement de l’allocation chômage. Je suis convaincu en effet que, concernant la lutte contre le chômage, la commune est l’échelon pertinent : elle a une connaissance très fine de sa population et serait en mesure d’adapter au mieux le service au public.
L’idée est la suivante : dès le lendemain de son inscription au Centre Municipal afin de recevoir son indemnité chômage, le demandeur d’emploi serait convoqué par un agent qui lui formulerait la proposition suivante : « souhaitez-vous que l’on vous aide dans vos démarches de recherche d’emploi où souhaitez-vous les effectuer par vous-même ? »
Si le demandeur d’emploi souhaite effectuer ses recherches d’emploi de façon autonome, on lui laissera trois mois pour le faire, période au cours de laquelle on ne lui demandera aucun compte.
Au bout de trois mois en revanche, il effectuera ses recherches au Centre Municipal, où il passera 35 heures par semaine. Il y aura son bureau avec un ordinateur et un téléphone. Il s’inscrira à des ateliers de recherche d’emploi ou à des cycles de formation et tous les déplacements nécessaires à ses recherches seront pris en charge par la collectivité.
Outre le fait que cette formule permet d’apporter une aide à ceux qui peinent à chercher un emploi de manière efficace, elle permet de ne pas altérer l’employabilité du demandeur d’emploi en le maintenant dans un cadre proche de celui de l’entreprise.
4. Moduler le Droit Individuel à la Formation en fonction des catégories d’emploi
Il s’agit ici de suivre le même principe que celui qui prévaut depuis 1945 dans notre système de sécurité sociale : « payer selon ses capacités, recevoir selon ses besoins ».
Les entreprises financent déjà la formation professionnelle à hauteur de leurs capacités, mais les salariés ne reçoivent pas en fonction de leurs besoins.
Je suis convaincu pour ma part que le cadre supérieur, qui a déjà bénéficié, aux frais de la collectivité, d’une excellente formation initiale, ne devrait pas bénéficier du même droit à la formation que la personne peu qualifiée qui risque de voir son emploi disparaître et pour laquelle la formation professionnelle constitue peut-être la seule chance de maintien dans l’emploi.
Je propose donc de concentrer les crédits de la formation professionnelle vers les personnes qui ont le moins bénéficié de la formation initiale – dans une logique de rattrapage – et dont l’emploi est en péril, par exemple parce qu’ils travaillent dans un secteur déjà condamné.
Vijay Monany ( Conseiller Municipal UMP en Seine-Saint-Denis. Il est le chef de file de la droite à Pierrefitte-sur-Seine. Il est par ailleurs consultant en management et Maître de conférences à l’Institut d’Etudes Politiques de Paris où il enseigne le management.)
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