15 octobre 2008
Peres tente de calmer des violences entre Juifs et Arabes
L.D. (lefigaro.fr) avec AFP
Un calme précaire règne depuis dimanche soir dans les rues de Saint-Jean D'Acre. 54 personnes ont été arrêtées pour atteinte à l'ordre public et douze sont encore détenues suite aux affrontements entre Juifs et Arabes. Crédits photo : AP
Dans la petite ville de Saint Jean d'Acre, en Israël, communautés juives et arabes s'affrontent depuis jeudi dernier. 700 policiers sont toujours en état d'alerte.
«On a toujours vécu en bonne entente, mais je crois que cette fois c'est terminé», lâche une habitante de Saint-Jean d'Acre. Cette petite ville d'Israël est le théâtre d'affrontements entre Juifs et Arabes depuis bientôt cinq jours. Le président israélien Shimon Peres s'est rendu lundi dans la ville pour s'entretenir avec les différentes parties afin d'appeler à la tolérance.«Nous sommes appelés à vivre côte à côte, et un avenir brillant attend Saint-Jean d'Acre» a-t-il martelé.
Et d'ajouter : «J'ai été surpris de l'ampleur des appels à la coexistence pacifique émis par les dirigeants des deux bords». Il a aussi rendu hommage à la police «qui a dû empêcher l'extension des violences, tout en évitant de faire de victimes». 700 policiers sont toujours déployés sur place, alors que la tension est toujours palpable, malgré un retour au calme dimanche soir. Depuis le début des émeutes, 54 personnes des deux bords ont été arrêtées pour atteinte à l'ordre public et douze sont encore détenues.
Saint-Jean d'Acre, ville de 52.000 habitants de Galilée, qui fut la capitale des Croisés, est composée à un tiers d'Arabes. Les deux communautés cohabitent depuis toujours dans le calme dans des quartiers distincts. Mais dans la nuit de mercredi à jeudi dernier, cette cohabitation a volé en éclat.
Un automobiliste arabe est entré dans un quartier, alors que ce soir-là, les Juifs avait commencé à célébrer le Yom Kippour, jour de Grand Pardon, pendant lequel ils jeûnent et ne peuvent pas circuler en voiture. Un groupe de jeunes juifs s'en est alors pris à l'automobiliste, l'accusant de faire volontairement du bruit. Celui-ci aurait fait marcher son autoradio à fond. Selon la police, une rumeur sur sa mort a alors provoqué des rassemblements de centaines d'habitants arabes en colère et entraîné les affrontements.
Tolérance zéro
«Les Arabes veulent nous chasser d'ici», raconte une Israélienne juive. Elle qualifie même de «pogroms» les pillages contre les magasins juifs de cette ville. Les magasins ont rouvert leurs portes lundi, mais sont désespérément vides. Seules les perceuses des ouvriers qui réparent les vitrines rompent le silence. Plus à l'ouest, des familles arabes ont été de leur côté préventivement évacuées par la police, après que des dizaines de manifestants juifs eurent conspué leurs voisins en scandant «Mort aux Arabes». «Nous ne sommes plus en sécurité dans notre propre ville», s'émeut Madiha Ramal, une avocate arabe.
Le Premier ministre démissionnaire, Ehud Olmert, a déclaré dimanche en réunion hebdomadaire du Conseil des ministres avoir demandé à la police de faire preuve d'une «tolérance zéro à l'égard des actes de violence». «Il n'y a pas d'autre alternative pour juifs et Arabes que de vivre dans le respect mutuel et la tolérance», a-t-il souligné.
Certains évoquent une «vague de violences » qui «va gagner toute la Galilée», une région où vivent la plupart des 1,3 million d'Arabes israéliens. Mais la coexistence entre les deux communautés est toujours une réalité et trouve des défenseurs. «Ceux qui s'opposent à la coexistence pacifique des deux communautés n'ont pas leur place ici», déclare Salem Atrache, le responsable du Comité des commerçants arabes de la vieille ville. Une conseillère municipale fait part de son optimisme : «Je suis convaincue que le dialogue intercommunautaire va nous permettre de restaurer le calme que nous connaissons depuis des dizaines d'années».
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SAINT-JEAN-D'ACRE (ISRAËL) ENVOYÉ SPÉCIAL
Depuis quatre jours la cité des croisés est sous tension. La coexistence pacifique qui régnait entre les communautés juive et arabe est ébranlée. Sept cents policiers et gardes-frontières ont été déployés pour tenter d'éviter de nouvelles violences. L'entrée principale de la cité et celle de la vieille ville et sa forteresse sont filtrées par les forces de l'ordre. Les carrefours stratégiques sont surveillés.
Plus d'une cinquantaine de personnes ont été arrêtées. Le calme apparent reste très précaire. Les touristes ont fui et les restaurants sont vides. Dans Ben-Ami, la principale rue commerçante, on remplace les vitrines brisées. Saint-Jean-d'Acre se prépare à la fête de Soukkot (la Fête des cabanes) qui commence, mardi 14 octobre, dans l'inquiétude. Les affrontements vont-ils recommencer ?
Tout a démarré à la veille d'une autre fête, celle de Yom Kippour (Grand Pardon), dans la nuit du 8 au 9 octobre. Pendant cette célébration juive, la circulation automobile est interdite. Un quinquagénaire arabe qui a eu le tort de braver cette règle religieuse largement respectée a été pris à partie par de jeunes juifs estimant qu'il s'agissait d'une provocation. Sa voiture a été caillassée. Jusqu'à présent, juifs et Arabes vivaient côte à côte dans les mêmes quartiers sans friction. Mais depuis quelques années, l'arrivée d'une nouvelle population juive, essentiellement des religieux (dont certains seraient d'anciens colons de Cisjordanie, voire de Gaza), a modifié l'entente cordiale.
L'incident de Yom Kippour a dégénéré lorsque la rumeur a couru qu'un Arabe avait été tué. Des centaines de jeunes Arabes en colère ont déferlé sur le centre-ville. La police n'a pas pris tout de suite la mesure de l'émeute. C'est ainsi que plus d'une centaine de voitures de la rue Yosef-Gadish a été vandalisée aux cris d'"Allah akbar" et "mort aux juifs". Gisèle Osiel a eu la peur de sa vie. "Ils avaient le visage masqué, des couteaux et des pierres. J'ai cru qu'ils allaient nous tuer." La foule a continué son expédition vengeresse dans la rue Ben-Ami, brisant les vitrines. Siwan, jeune vendeuse d'un magasin de vêtement, ne comprend pas pourquoi tout a explosé car, dans cette ville de 52 000 habitants dont un tiers est arabe, les incidents intercommunautaires étaient jusqu'à présent très rares. "Aujourd'hui, dit-elle, ça peut dégénérer à tout moment. On se dit à peine bonjour. On se lance des mots mauvais. Et cet hélicoptère qui tourne ne fait pas baisser la tension."
Shimon Lankri, le maire, a décidé d'annuler le festival de théâtre qui devait démarrer cette semaine. Ce qui a irrité les commerçants arabes de la vieille ville pour lesquels l'afflux de visiteurs à cette occasion constitue une importante ressource. La proximité des élections municipales, prévues le 11 novembre, exacerbe également les tensions. Saint-Jean-d'Acre, tranquille cité fortifiée que Bonaparte n'était pas parvenu à conquérir, vacille sous la menace d'un conflit intercommunautaire. Comme le souligne Claude Lévy, conseiller du maire : "Il n'était pas possible de laisser faire un tel débordement. La frontière a été franchie. Le maire a exigé de la fermeté afin d'éviter que la prochaine fois ce ne soit pire." Le premier ministre démissionnaire qui expédie les affaires courantes, Ehoud Olmert, a demandé à la police de faire preuve de "tolérance zéro à l'égard des actes de violences" et appelé au "respect mutuel". Le chef de l'Etat, Shimon Pérès, devait se rendre sur place, lundi, pour tenter "de calmer les esprits".
Mais la fracture s'est faite. Elle sera longue à réparer. A l'est de la ville, dans le quartier Numéro Trois, d'importantes forces de police sont postées dans les secteurs sensibles. Après la descente des Arabes dans le centre-ville, des groupes de juifs s'en sont pris à leurs voisins en criant "mort aux Arabes". Plusieurs maisons ont été incendiées. D'autres ont été caillassées.
Des familles arabes ont été évacuées par la police de peur d'être victime de représailles. La famille Barghouti, à l'angle de la rue Hayot-Zrim, refuse de quitter sa maison de peur qu'elle ne soit vandalisée puis brûlée. Les vitres ont été brisées. Les canapés servent de boucliers contre les pierres. Depuis quatre jours, les Barghouti vivent reclus et espèrent que la raison va l'emporter sur la vengeance. "Voilà vingt ans que nous habitons ici sans problème avec nos voisins, déplore Khaled, le fils de 25 ans. Aujourd'hui, ils veulent que les Arabes partent mais cette ville est à tout le monde et j'espère que l'on pourra vivre à nouveau ensemble en paix."
Le chauffeur de taxi qui roulait le soir du grand Pardon (Yom Kippour) dans le quartier oriental d'Acco (St-Jean d'Acre) a été arrêté lundi après-midi par la police pour avoir roulé trop vite en risquant la vie des passants.
Le député arabe israélien Ahmed Tibi a déclaré après l'arrestation du chauffeur de taxi arabe à l'origine des émeutes d'Acco (St-Jean d'Acre) que « c'est une décision irraisonnable et illégale de la police israélienne » . « L'arrestation prouve que la police accepte le diktat des hooligans juifs et je serais surpris si maintenant elle arrête aussi des Juifs qui boivent pendant le Ramadan » a-t-il estimé.
Source: Guysen News
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