Exclusif - Nicolas Sarkozy reste le seul présidentiable à droite!
08 mai 2008
Thomas de Rochechouart
J + 366 : au moment où le président de la République fêtait dans la discrétion l’anniversaire de son élection, la France basculait dans la deuxième année de l’ère Sarkozy. La page de l’élection présidentielle 2007 s’est ainsi définitivement refermée et, par un effet mécanique, l’échéance de 2012 nous paraît d’un seul coup plus proche. C’est là l’une des conséquences du quinquennat : l’accélération du rythme électoral a entraîné une présidentialisation permanente de la vie politique. Face aux critiques, Nicolas Sarkozy renvoie ainsi son bilan en 2012, répétant que quatre ans, « ça passe vite ». D’ailleurs n’avait-il pas lancé la campagne présidentielle 2007 dès 2002 ? De leur côté, Ségolène Royal et Bertrand Delanoë ont engagé la bataille pour la prise du PS. Là encore, leur objectif est de contrôler l’appareil du parti pour obtenir l’investiture l’élection en 2012. C’est pourquoi France-Soir a décidé de sonder les Français pour connaître leurs candidats préférés, à l’UMP et au PS, en vue de l’échéance.
Les résultats sont particulièrement intéressants. A l’UMP, Nicolas Sarkozy arrive ainsi largement en tête. En dépit des mauvais sondages qui s’accumulent sur son bureau depuis plusieurs mois, et des records d’impopularité qu’il bat actuellement, le président de la République reste aux yeux de son camp le seul présidentiable possible pour 2012 (64 % chez les sympathisants UMP, 46 % pour la droite en général). Malgré une cote de popularité supérieure à celle du chef de l’Etat, François Fillon ne s’impose pas pour le moment comme une solution de remplacement(14 % pour la droite, 15 % pour l’UMP). « Le Président me connaît assez pour savoir que je suis fidèle, loyal, sans être courtisan », aime à répéter le Premier ministre. S’il a pu le devancer de 20 points dans certains sondages, il n’est pas à l’heure actuelle un rival pour le chef de l’Etat. Un rôle que ne semblent pas non plus en mesure de jouer Alain Juppé et Dominique de Villepin pour le moment. Les deux anciens Premiers ministres, héritiers des traditions chiraquienne et gaulliste, ne font pas d’ombre au président de la République dont le style « bling-bling » a été brocardé. Si, dans une « boutade », Alain Juppé a récemment déclaré qu’il n’excluait pas d’être candidat en 2012, il ne recueille que 14 % des soutiens des sympathisants de droite. Quant à Dominique de Villepin, qui fut le grand rival de Nicolas Sarkozy entre 2005 et 2007, il semble encore trop englué dans l’affaire Clearstream pour se placer dans une position de recours.
Jérôme Sainte-Marie, directeur de BVA-Opinion : « Le chef de l’Etat n’a pas de rival à droite »
FRANCESOIR. Comment analysez-vous les résultats de ce sondage pour le chef de l’Etat ?
JÉROME SAINTE-MARIE. Ce sondage est très intéressant. Ses résultats sont décevants pour Nicolas Sarkozy puisque, un an après son élection, il réunit moins de la moitié des sympathisants de droite et seulement 24 % des Français – c’est peu pour un sortant. Et dans le même temps, c’est très réconfortant pour lui, car l’autre moitié se disperse et aucun autre candidat potentiel ne s’impose naturellement dans son camp. En dépit de sa forte impopularité, il n’y a pas actuellement à droite d’alternative au président de la République. Celui-ci reste bel et bien le chef de la majorité.
François Fillon, notamment, reste largement à distance, en dépit d’une côte de popularité plutôt élevée…
Oui, et c’est pour moi le principal enseignement du sondage. Dominique de Villepin obtient des scores résiduels et Alain Juppé n’est pas en situation. Le faible résultat de François Fillon est en revanche une surprise. Si, dans la mesure des côtes de popularité de l’exécutif, François est un élément de comparaison à Nicolas Sarkozy, il n’apparaît pas comme un rival à ce dernier. Les Français ne le voient pas dans ce rôle, pas encore en tout cas, alors que normalement le Premier ministre devient mécaniquement présidentiable quand il entre à Matignon.
Le fait qu’il soit davantage en première ligne depuis les municipales peut-il jouer sur les résultats ?
Depuis que Nicolas Sarkozy l’a associé totalement aux réformes, le Premier ministre a vu sa cote de popularité baisser. Mais on s’aperçoit que François Fillon est surtout populaire auprès des Français en tant que contre-poids au président de la République. Il ne le concurrence pas sur le terrain présidentiel. Ce premier anniversaire marque il est vrai un retour au fonctionnement classique de la Vème République. Nicolas sarkozy, qui voulait sortir de l’hypocrisie du système en se plaçant sur le devant de la scène, a fini par s’y rallier, en se mettant davantage en retrait.
A gauche, la situation reste indécise…
Oui, nous avons une triple confirmation. Premièrement, celle de l’inaptitude à exister de Laurent Fabius et François Hollande, lequel, après onze ans passés à la tête du PS réalise un score marginal. Ensuite, on s’aperçoit que Dominique Strauss-Kahn existe davantage en dehors de son parti. Sa première place quand on interroge les Français est une victoire en trompe-l’œil. Et pourtant, il représente une alternative crédible en cas d’autodestruction de Ségolène Royal et Bertrand Delanoë. Enfin, ces derniers sont toujours au coude à coude. Et si Ségolène Royal possède un léger avantage comptable, les résultats avantagent plutôt Bertrand Delanoë.
Pourquoi ?
La stratégie de Ségolène Royal est de jouer l’opinion contre l’appareil du PS. Mais sur ce point, elle ne possède pas un avantage décisif sur le maire de Paris. Ce dernier, porteur de l’esprit de parti, a donc toutes les cartes en main pour remporter son duel l’opposant à l’ancienne candidate.
Le fait que la situation au PS soit toujours indécise avantage-t-elle Nicolas Sarkozy ?
Oui et non. Il est sûr que pour Nicolas Sarkozy, la situation est pour le moment dégagée dans son camp, puisqu’il a laminé tous ses opposants. Et s’il rencontre une forte crise de popularité, celle de l’opposition est aussi grande. Un an après l’élection présidentielle, la situation au PS n’a pas évolué : absence de leader, de ligne politique, de contre-propositions… Si ce contexte l’épargne politiquement, ce n’est pas forcément une bonne nouvelle pour le président de la République. Car quand le pouvoir et l’opposition sont en crise, le débat politique a tendance à se déplacer vers le champ social. Et la contestation s’exprime dans la rue, comme ce fut le cas en 1968 ou en 1995. C’est d’ailleurs ce à quoi nous sommes en train d’assister en ce moment, et les conditions sont propices pour de forts mouvements sociaux. Pour le chef de l’Etat, il y a donc un risque de se retrouver à la tête d’un pays ingouvernable au moment où il s’apprête à lancer d’importantes réformes.
Edition France Soir du mercredi 7 mai 2008 n°19790 page 2
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