On s’accorde aujourd’hui à penser que les Juifs se sont installés au Maroc depuis l’Antiquité . Certains historiens pensent même que des départs eurent lieu avant la destruction du premier Temple. Une des légendes qui accrédite cette thèse soutient que Phéniciens et Hébreux se rendaient près de Sala (Chella) non loin de Salé, l’actuelle Rabat pour acheter de l’or. Mais le plus ancien témoignage épigraphique ne remonte qu’au IIe siècle de notre ère, s’agissant essentiellement d’inscriptions funéraires en hébreu et en grec trouvées dans les ruines de la Volubilis romaine, entre Fès et Meknès.
La conquête arabe du Maroc qui débute au VIIe s. et la conversion à l’Islamdisperse la présence juive parmi les tribus Berbères plutôt qu’elle ne l’éradique. Ainsi les oasis du désert et les montagnes du pays sont-elles habitées par de nombreuses tribus de Berbères juifs.
Le XVIIIe sièclecorrespond au début des interventions européennes. C’est l’époque où les Juifs de l’Atlas gagnent les grands centres urbains, venant grossir les mellah de Fès et de Meknès qui deviennent rapidement insalubres étant donné la surpopulation
La présence juive au Maroc est très ancienne et fut nourrie par diverses vagues de réfugiés suite aux vicissitudes et persécutions dont ont été victimes les Juifs au cours de l'Histoire, mais aussi des conversions parmi les populations berbères autochtones. Cette communauté compte deux sous-ensembles ethnico-culturels : les toshavim "autochtones" et les megorashim "expulsés (d'Andalousie)".;
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Si la communauté juive s'est trouvée forte de plusieurs centaines de milliers d'individus jusqu'au XXe siècle, elle s'y est réduite pour ne plus compter actuellement qu'entre 3000 et 7000 membres, selon les sources. Les différentes communautés juives d'origine marocaine comptent désormais plusieurs centaines de milliers de membres à travers le monde
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Un lien très fort unit les Juifs du Maroc à cette terre et à ses
habitants. Lien qu’on ne retrouve pas dans la société traditionnelle
du monde ashkénaze. Aucune société juive traditionnelle en Europe
ne s’est identifiée à ce point à la culture du pays dans laquelle elle
était établie.
Cette exposition s’inscrit dans les objectifs du musée d’inciter
les visiteurs, Juifs et non-Juifs, à s’interroger sur les spécificités,
les correspondances et les emprunts réciproques de leurs
héritages culturels respectifs.
L’histoire des Juifs du Maroc commence dès le IVe siècle avant J.-C. Les villes de Sala et d’Ifrane sont des centres importants de négoce, où l’on pratique le commerce de l’or et du sel. Au début de l’ère chrétienne, les Romains envahissent la région. De nombreuses mesures restrictives envers les Juifs sont mises en place et le christianisme devient religion d’État. La communauté juive marocaine connaît, au Ve et au VIe siècle sous les Vandales et les Byzantins, des périodes de répit et d’oppression. L’islamisation du Maroc se fera progressivement à partir du VIIe siècle.
Les Juifs seront soumis à la dhimma dès la première dynastie musulmane en 788.
Du IXe au XIIe siècle, la communauté juive du Maroc connaît son premier âge d’or, lors de la fondation de Fès qui devient la capitale culturelle et spirituelle du judaïsme marocain, où brillent la poésie de Juda Halévy, la science hébraïque d’El-Fassi et la pensée de Maïmonide.
Du XIIIe au XVe siècle, sous la dynastie berbère, la situation des Juifs s’améliore. Mais la création du mellah, quartier réservé aux Juifs, entrave le dialogue judéo-musulman.
En 1465, le sultan est assassiné, les Juifs de Fès, sont massacrés. En 1492, les Juifs, fuyant l’Espagne, font renaître le judaïsme marocain et contribuent à l’essor économique. Un second mellah est créé à Marrakech, capitale du Maroc. Au XVIIe siècle, la communauté juive participe à la construction de Meknès, qui devient la nouvelle capitale. En 1765, le Sultan Abdallah fonde le port de Mogador et accorde à plusieurs familles juives des privilèges commerciaux, comme le monopole d’exportation du tabac et des parfums. De 1790 à 1859, trois sultans se succèdent. Le sultan Lyazid pille les communautés de Tétouan, Meknès, Rabat, et coupe une oreille aux Juifs afin de les distinguer. L’avènement de Moulay Slimane permet aux Juifs de retrouver leurs privilèges. Son successeur mènera une politique ambiguë envers les juifs. Après la guerre de Tétouan, le Maroc s’ouvre à la civilisation occidentale. La première école de l’Alliance israélite est créée en 1862.
L’aide financière apportée par les Rothschild et le baron de Hirsch assure la survie de la communauté juive marocaine. Le règne de Moulay Hassan permet aux Juifs de connaître une brève accalmie avant une fin de siècle tragique. Les émeutes de Sefrou font plus de quarante victimes juives, le mellah de Mogador est pillé, les juifs de Fès, Meknès et Marrakech sont persécutés. Lors du protectorat français, en 1912, l’insurrection éclate, les musulmans s’en prennent aux Juifs et les massacrent.
L’Alliance israélite continue le processus de francisation des Juifs. Des mouvements sionistes se développent et organisent une conférence à Casablanca en 1930. En 1939, des centaines de Juifs s’engagent dans l’armée française. Sous Vichy, le Statut des juifs est voté en 1940 mais son application reste modérée.
Le sultan Mohammed V protège la communauté et déclare : « Il faudra prévoir vingt Étoiles jaunes supplémentaires pour moi et ma famille.»
Après le débarquement américain en 1942, la communauté du Maroc se reconstruit. Dès la proclamation de l’État d’Israël en 1948, un climat de tension s’installe. Au Maroc, Oujda devient la plaque tournante d’un mouvement d’alyah clandestine. Des incidents sanglants ont lieu. En 1949, plus de huit mille personnes partent en Israël. Lors de l’indépendance du Maroc en 1956, les Juifs occupent des postes importants dans le gouvernement et l’administration marocains. Mais les difficultés intérieures, la méfiance vis-à-vis des Juifs qui soutiennent Israël et l’instabilité politique poussent les Juifs à quitter le Maroc pour la France, Israël, le Canada et les États- Unis. En 1977, il ne reste plus que vingt-cinq mille Juifs.
En 1982, au sommet arabe de Fès, Hassan II présente un plan de paix. La reconnaissance d’Israël y est implicite. Il est le premier dirigeant arabe à recevoir des hommes d’État israéliens, comme Yitzhak Rabin et Shimon Peres. En 1999, Mohamed VI remplace son père. Il continue sa politique. Avec la deuxième Intifada, le processus de normalisation diplomatique entre Rabat et Jérusalem est gelé, ce qui provoque des tensions dans le pays. Robert Assaraf, de Radio Shalom, commente : «La série d’attentats en 2003 a secoué la communauté juive marocaine. Attribués à Al-Qaïda, ils ont visé des symboles, comme le cimetière de Bab Jdid et l’Alliance juive de Casablanca. Cela ne m’a pas empêché d’y retourner. Le Maroc, c’est le pays de mes racines et de mes aïeux. J’ai toujours été en contact avec les hauts dignitaires du Maroc, comme Hassan II. Lui seul a compris que la paix entre Juifs et musulmans devait passer par la paix avec Israël. »
Une communauté toujours vivante Aujourd’hui, les Juifs marocains sont des citoyens à part entière. Une petite communauté réside à Rabat, Marrakech, Agadir, Meknès. Mais c’est à Casablanca, métropole économique, que vivent quatre mille Juifs.
La communauté est structurée, avec ses différentes institutions, comme l’explique Georges Asseraf, de l’association Néomaroc : «Le Conseil des communautés israélites a créé la Fondation du patrimoine culturel judéo-marocain afin d’entretenir les synagogues et les cimetières. Il y a un réseau d’écoles et des commerces. La communauté vit en harmonie avec ses voisins musulmans mais ils ne se connaissent plus. Les jeunes voient le Juif comme un exotisme, ils ignorent l’empreinte de l’histoire juive dans la nation.
Avec la montée de l’islamisme dans les universités, des aides ont été accordées pour favoriser l’alyah. » Chaque année, les expatriés venus du monde entier se retrouvent autour de tombeaux de saints situés à Ouezzane, Essaouira ou Taroudant pour fêter la hiloula, version juive du moussem, qui rappelle les fastes du passé et commémore l’attachement à la terre des ancêtres.
Pour David Tolédano, directeur d’entreprise à Rabat, «il ne faut pas dire que c’est terminé et continuer à faire des choses ». Plusieurs associations comme, celle des Juifs de Safi et de Casablanca, ont été créées afin de faciliter les «retrouvailles» avec le Maroc.
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