Une nouvelle dédicace personnelle à mon ami pierrefittois d'origine polonaise: Michel Swiatek 

Les soldats maudits de la liberté : l’ultime combat de l’Armia Krajowa

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En ce début de l’année 1944, une unité d’élite quitte l’église de Turgiele, à l’est de Wilno. En tête : le sous-lieutenant Romuald Rajs, surnommé « Bury ». Ce nom résonnera longtemps dans la mémoire polonaise, tant il incarne le courage des combattants de l’ombre — ces hommes de l’Armia Krajowa (AK), l’armée clandestine fidèle au gouvernement polonais en exil. Leur destin ? Livrer une double guerre : contre l’occupant nazi, d’abord, puis contre l’emprise soviétique. Une tragédie en deux actes, pour un peuple abandonné par l’Histoire.

Une armée qui n’a jamais capitulé

Contrairement à d'autres nations occupées, la Pologne n’a jamais signé de capitulation. Dès le 27 septembre 1939 — à peine trois semaines après l’invasion allemande — les premiers réseaux de résistance voient le jour, sous le nom de Service de la Victoire de la Pologne. En novembre, cette organisation devient l’Union de lutte armée, puis l’Armia Krajowa à partir du 14 février 1942.

Cette armée souterraine n’est pas un simple groupe de partisans : elle est structurée, disciplinée, dotée d’un commandement clair et fidèle au gouvernement polonais réfugié à Londres. Des catholiques, des patriotes, des civils, des militaires issus de tous horizons politiques s’y retrouvent pour une cause commune : rendre à la Pologne sa souveraineté, sa démocratie et son honneur.

L’Opération Tempête : l’ultime espoir de liberté

À l’été 1944, l’AK engage son baroud d’honneur. C’est l’Akcja Burza — l’Opération Tempête. L’idée est simple : reprendre les villes polonaises avant l’arrivée des Soviétiques, et les accueillir en alliés, pour empêcher l’installation d’un pouvoir communiste.

Le point culminant est atteint à Varsovie, où, le 1er août 1944, les insurgés se soulèvent. Pendant 63 jours, sans soutien extérieur, ils tiennent tête à la Wehrmacht. Mais Staline refuse d’intervenir : l’Armée rouge, pourtant positionnée à quelques kilomètres de là, observe sans bouger, laissant les nazis anéantir la capitale polonaise. 200 000 morts et une ville rasée : tel est le prix du sacrifice.

Trahis par l’Est, abandonnés par l’Ouest

L’AK, déjà éprouvée, ne se relèvera pas. Lors de la libération de Vilnius, en juillet 1944, les soldats polonais qui combattent aux côtés des Soviétiques sont immédiatement arrêtés, déportés ou exécutés par le NKVD. Le massacre de Katyn, découvert peu avant, avait déjà révélé au monde l’ampleur des crimes soviétiques contre les officiers polonais. Désormais, c’est toute une armée que Staline entend faire disparaître.

Les Conférences de Yalta et Potsdam entérinent cette tragédie : les Alliés occidentaux acceptent le partage de l’Europe, y compris l’annexion des territoires polonais de l’Est par l’URSS. La Pologne, amputée et déplacée vers l’Ouest, entre dans l’orbite soviétique.

Les soldats maudits : le dernier cri de l’honneur

Après 1945, plus de 60 000 anciens membres de l’AK sont arrêtés. 50 000 sont envoyés au Goulag, les autres exécutés, torturés ou traqués. Le gouvernement communiste offre une fausse amnistie pour mieux les piéger. Parmi les victimes : Witold Pilecki, infiltré volontaire à Auschwitz, qui sera exécuté comme traître par les communistes.

Romuald Rajs, dit « Bury », poursuivra la lutte dans la clandestinité, rejoignant le WiN (Wolność i Niezawisłość, Liberté et Indépendance). Ses hommes, vêtus des mêmes uniformes que ceux portés lors de l’invasion nazie de 1939, mènent une guérilla contre le pouvoir soviétique jusqu’en 1952. On les surnommera plus tard : les « soldats maudits » (Żołnierze wyklęci).

Aujourd’hui, ils sont considérés comme des héros nationaux. Leur combat, oublié pendant des décennies, est désormais célébré en Pologne comme un symbole de dignité, de résistance et de fidélité à la patrie — même quand le monde entier les avait abandonnés.

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