un Napoléon dans la guerre 1939/1945.
Louis-Napoléon, âgé de 25 ans, rencontra à Genève, en ce funeste début d'année 1939, le colonel Barthe, un ami de Daladier, et lui remit le 15 février un lettre destinée au président du Conseil où il demandait l’autorisation de faire son service militaire en France. Né en Belgique, le prince n'oubliait en rien que son illustre nom était envers et contre tout attaché aux destinées de la France. Devant l’absence de réponse, Louis-Napoléon reprit la plume au mois d'août suivant afin d’obtenir le droit de s’engager dans le Corps de Troupe Combattant métropolitain ou dans la Légion étrangère. La même demande fut formulée quelques jours plus tard au président de la République, puis de nouveau au président du Conseil. Daladier lui répondit finalement le 28 septembre précisant que la loi d'exil frappant sa famille ne permettait pas de répondre favorablement à ses vœux.
Ecœuré, il décida de prendre les devants et franchit la frontière franco-suisse le 16 mars 1940. Deux jours plus tard, il se présentait à l’Intendance militaire de Vancia, dans l’Ain, et souscrivait un engagement militaire à la Légion étrangère, sous le nom de Blanchard. Son identité véritable ne tarda pourtant pas à être révélée. Daladier fut prévenu mais laissa faire. Blanchard partit pour Marseille ; ville qu’il quitta pour Oran, le 29 mars. Il atteignit ainsi Sidi-Bel-Abbès le 3 avril pour être affecté à la compagnie de passage n°2 puis à la n°1 du 1er régiment etranger. Ce fut à Saïda, en pleine instruction, que notre légionnaire apprit la signature de l’armistice. Le 5 septembre, à sa demande, il était rayé des contrôles et se retirait à Lausanne.
Ses prises de contacts avec les services de renseignements français en 39 lui permirent cependant de servir à nouveau la France. Ainsi, de 1941 à décembre 1942, Louis-Napoléon accomplit des missions en métropole et à l’étranger et travailla pour le compte du BCRA de la France Libre.
Le débarquement allié en Afrique du nord le décida finalement à quitter l’Europe. Saulcet, Toulouse, Foix, Saint-Girons. Vint le passage des Pyrénées où le prince et trois camarades furent finalement cueillis par les Allemands. Transféré au fort du Hâ puis à Fresnes, Louis-Napoléon prétendit mener seulement une excursion de haute montagne. Les Nazis tombèrent dans le panneau et le libérèrent au début de l'année 1943. Il venait de passer quatre mois dans les prisons de l'ennemi*.
Bien que surveillé par la Gestapo, le prince reprit contact avec la Résistance. Sous les noms de Renault ou Muller, il servit en province pour le compte de l’Organisation de Résistance Armée avant de rejoindre le maquis sous le commandement du commandant Carol**. Là, il devint 2e classe puis sergent au sein de la 1ère compagnie du 17e BCP*** reconstitué dans la région de Châteauroux (brigade Charles-Martel).
Le 28 août 1944, alors que le maquis de la Brenne s'était résolument lancé dans la lute à outrance depuis le 15 juillet dernier, le prince Napoléon, alias Louis Monnier, échappa de peu à la mort. Sur la route de Châteauroux, accompagné de quatre artificiers FFI et de leur chef d'équipe, l’adjudant d’artillerie Léopold Linarès, il tomba dans une embuscade au sommet de la butte de Montbel (un monument commémore aujourd'hui l'affaire). Sous le feu nourri d'armes automatiques et d’un canon de 47, blessé à la jambe par un éclat d’obus, il parvint à s’échapper et à regagner le PC du bataillon. Ses cinq compagnons d’armes avaient péri.
Sorti de l’hôpital de Châteauroux, le 17 septembre, Napoléon gagna Paris où il obtint le grade de lieutenant FFI sous le nom de Louis de Montfort et fut cité à l’ordre de la division pour l’affaire du 28 août.
Le 29 octobre, il rencontra De Gaulle qui le félicita pour ses services rendus à la France.
Envoyé sur le front de Saint-Nazaire, il y reçut la croix de guerre, le 27 novembre avant de rejoindre, après un passage à l’état-major de Koenig, son affectation définitive à la 27e division alpine le 1er janvier 1945, malgré son souhait de rejoindre les rangs de la 2ème DB. Ce fut au sein de ce corps que Louis-Napoléon fêta le 8 mai. Quatre jours plus tard, il était affecté à l’Ecole de haute montagne. Le 30 septembre 1946, le lieutenant de Montfort, décoré de la Légion le 4 février, était finalement démobilisé.
*lors de son incarcération après l'echec du passage des Pyrénées. On proposa au Prince, à cette occasion, de collaborer avec l'ennemi. Il répondit ceci : "Comment reconnaîtrais-je votre politique alors que vous occupez la France, que vos alliés et vous revendiquez ses terres de Corse, Nice et la Savoie, et que l'Alsace et la Lorraine enfin sont terres allemandes ? Trop de mes fidèles ne comprendraient plus. Je suis Français et National."
**Le colonel Chomel était à la tête de la brigade Charles Martel (du pseudonyme du colonel, entré en resitance en novembre 42 ). Ce corps de troupes comptait en 44 un PC (basé au château de Blizon, à proximité de Mézières-en-Brenne), le bataillon d'Epernon (ou 32e demi-brigade), le bataillon Lenoir (ou 27e demi-brigade), une unité de cavalerie (le 8e cuirassiers) et le bataillon Carol (ou 17e BCP). C'est dans cette dernière unité, comme il a été dit plus haut, que servit le prince Napoléon. Dirigé vers Chomel et le commandant Carol (de son vrai nom Costa de Beauregard) par le colonel Navarre (chef de service de renseignements de l'O.R.A.), il emmena avec lui un groupe de compagnons dont le sous-lieutenant prince Joachim Murat.
On possède une lettre du prince Napoléon écrite au commandant Carol :
"Mon cher commandant et ami,
Au moment où je reprends pour la seconde fois, l'uniforme de soldat et qu'en même temps j'abandonne la lutte clandestine pour la lutte ouverte contre l'oppression ennemie, je viens t'assurer, comme tu me l'as demandé, que je prends toute la responsabilité de ma décision à l'égard de toute personne qui pourrait en demander compte et pour tout ce qui pourrait m'arriver au cours de la campagne que nous allons entreprendre. Je veux, de ma pleine volonté, sans qu'aucune pression ne s'exerce sur moi, prendre la part des risques qui revient à un Français dans la lutte contre l'envahisseur, et à la place la plus humble. Je le fais sans prétendre à aucun droit qui pourrait en résulter pour moi, sans songer à demander à qui que ce soit ensuite du fait de ma conduite. Je ne songe qu'à un devoir d'honneur à l'égard de mon Pays. Je te suis reconnaissant de le comprendre et de m'aider dans l'accomplissement de mes intentions pour le salut, pour l'honneur et la gloire de la France. Ton bien affectionné. Napoléon."
***le lieutenant Joachim-Louis-Napoléon Murat est tombé au champ d'honneur le 20 juillet 1944. Ce jour là, le prince accompagné de son chauffeur Olivier Paquin accomplissait une mission de liaison pour le 17e BCP. Ils se heurtèrent à une colonne allemande vers midi, au lieu-dit Gabriau Gabrière. Joachim n'avait que 24 ans. Peu de temps avant sa mort, le prince avait déclaré : "Je suis venu au maquis avec l'approbation de mon cousin. Si je meurs, ce sera en le servant, lui et ma patrie." Il repose depuis le 12 décembre 1961 au Père Lachaise.
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