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Photo: AP © 2009 - Armando Franca 

ISRAEL


Selon les accords, Israël doit acquérir trois nouveaux avions Hercules, pour une valeur d'un quart de million de dollars. Les avions ont été produits selon les spécifications israéliennes et comprennent un grand nombre de systèmes développés par l'industrie de défense israélienne. L'achat sera couvert par les fonds d'aide américain aux pays étrangers.




Construire à Jérusalem

AP Photo

 La crise diplomatique entre Israël et les Etats-Unis dure depuis plus de deux semaines. Elle s’est sans doute aggravée à l’occasion de la visite de Benyamin Netanyahou à la Maison Blanche. La radio de l’armée israélienne a affirmé que "toutes les tentatives pour surmonter les tensions avec l’administration ont échoué". Les mots de la presse sont éloquents : déception, échec cuisant, bras de fer, pression, crise, guerre froide…, les médias israéliens présentent Benyamin Netanyahou comme un homme traqué, "le dos au mur", selon le Maariv qui parle même d’embuscade à la Maison Blanche…

Obama s’est montré directif, exigeant et plus ferme que jamais, plaçant le Premier ministre israélien face à un dilemme. Si la reprise des pourparlers avec les Palestiniens est une exigence américaine, l’appui des Etats-Unis dans la lutte que doit mener Israël contre le danger nucléaire iranien demeure indispensable.
 
Qu’il est difficile de construire à Jérusalem!

 "Jérusalem n’est pas une colonie, Jérusalem est la capitale d’Israël". Cette courte phrase prononcée avec solennité par Benyamin Netanyahou au congrès de l’AIPAC la veille de sa rencontre avec le Président américain donnait le ton. Le Premier ministre israélien a souhaité légitimer les décisions prises en matière de construction à l’est de Jérusalem. Il a surtout voulu rappeler que Jérusalem est au centre de la vie juive depuis trois mille ans et au cœur de la vie israélienne depuis 1948. Conquise en 1967, c’est une loi fondamentale israélienne qui en fait la capitale de l’Etat hébreu. 
 
 Le classement de Jérusalem comme le troisième lieu saint de l’Islam est assez récent. Employé comme un argument de la propagande antisioniste depuis 1967, il sert aujourd’hui la "communication martyre" palestinienne qui exprime une crainte pour la préservation de leurs lieux saints pourtant construits sur les vestiges juifs les plus précieux. Faire croire qu’une guerre de religions menace, réduire les options politiques de l’actuel gouvernement israélien à une stratégie de judaïsation de Jérusalem. Déduire qu’un gouvernement de droite fermerait volontairement toutes les portes du dialogue pour la paix. 
 
 Oubliés, les missiles Qassams tirés sur le Néguev. Oubliées les tentatives de relancer une troisième Intifada. Oublié, le refus de Mahmoud Abbas de reprendre les pourparlers. Le Président de l’Autorité palestinienne détient les clés d’un chantage qu’Israël ne peut accepter. 
 
 Jérusalem est la capitale d’Israël dans tous les sens du terme : historique, politique, économique. Son maire est un laïque soucieux de développement économique et d’harmonie sociale. La nécessité de construire à Jérusalem échappe largement aux considérations spirituelles, mais répond d’abord à un souci démographique, une exigence sociale. 

 Campé sur la ligne palestinienne qui exige un retour aux frontières de 1967, Obama reste donc convaincu que la paix au Proche Orient passe par la création d’un Etat palestinien, vaille que vaille. L’échec de la rencontre était annoncé, et Netanyahou s’est en outre retrouvé face à un homme dopé par le succès du vote historique sur la réforme de l’assurance maladie. 

 Sans scrupule, Obama a présenté à Netanyahou treize requêtes. Il "attend" une réponse positive. Parmi ces "attentes", une promesse selon laquelle le gel de la construction se poursuivra au-delà des dix mois approuvés par le gouvernement israélien, soit après le 26 septembre. Obama souhaite aussi que les dispositifs mis en place à Jérusalem empêchent des constructions dans les quartiers palestiniens de l’est de la ville. 

 L’autre "attente" d’Obama est qu’Israël redonne à l’Autorité palestinienne le plein contrôle de tous les territoires qui étaient sous sa responsabilité en septembre 2000. Ce contrôle a été perdu durant la deuxième Intifada. Les autres attentes concernent la libération de plusieurs centaines, voire d’un millier, de prisonniers, sans aucune contrepartie de la part des Palestiniens… Il y a quelques mois encore, leur échange contre Guilad Shalit était pourtant envisagé. 

 Obama exige aussi l’ouverture de pourparlers sur un accord permanent qui devront être complétés sous deux ans. Le Président américain demande des réponses immédiates. Dans ce climat de défiance, Obama évoque des questions pratiques tandis que le Premier ministre israélien parle de souveraineté, sécurité, stabilité gouvernementale.  

 Après 90 longues minutes, Obama s’est conduit en homme pressé. Il a pris congé de son hôte pour dîner en famille, avec Michelle et ses filles, sans lui. Invité à s’isoler dans l’enceinte de la Maison Blanche pour téléphoner à Jérusalem, prendre contact avec son cabinet, et pour annoncer au Président tout changement de position, Benyamin Netanyahou a sans doute connu l’un des pires moments de sa carrière politique. 
 
 Une heure et 17 minutes plus tard, les deux hommes parlaient à nouveau. Pendant 25 minutes, le Président a demandé au Premier ministre de prendre les mesures en vue de "bâtir la confiance"…
 
 Sans déclaration commune, sans communiqué de presse, sans photographe, cette rencontre ressemble à un affrontement. Si, comme l’a déclaré Nancy Pelosi, le Congrès américain est aux côtés d’Israël, le Président Obama est quant à lui aux côtés des Palestiniens. Choix de politique extérieure oblige, il continue de faire pression sur Israël pour montrer aux pays arabes qu’il est un partenaire crédible voire "équitable", comme il le répète. 
 
 Qu’il est difficile de construire à Jérusalem ! Et pourtant, les décisions que l’on reproche au gouvernement sont prises par la municipalité de Jérusalem, et celle-ci fournit des permis de construire des sites industriels, surfaces commerciales et logements aux citoyens de Jérusalem, qu’ils soient juifs, musulmans ou chrétiens.  

 Le maire de Jérusalem n’entend pas renoncer au développement de sa ville. Le Premier ministre n’entend pas renoncer au caractère indivisible de sa capitale. Le Président américain n’entend pas renoncer  aux pressions sur Jérusalem… Si la rencontre entre le Président du pays le plus puissant au monde et le Premier ministre du plus petit pays du monde est déjà écrite comme une page sombre de l’histoire des relations américano-israéliennes, elle a cependant révélé une double détermination. Celle du responsable israélien, qui dans sa posture de coureur de fond, résistant et légitimiste, continue de clamer que Jérusalem est la capitale d’Israël. Celle de Barack Obama, qui adhère plutôt au souci des Palestiniens de faire de Jérusalem la capitale de leur futur Etat.   
 C’était au mois de juin 2008. Barack Obama était candidat démocrate aux élections présidentielles américaines. En visite en Israël, devant le Mur occidental du Temple détruit, il déclarait alors Jérusalem capitale indivisible de l’Etat d’Israël.   

Ce soir, nos pensées vont vers Guilad Shalit, otage du Hamas, soldat de Tsahal et citoyen français,  privé de l'amour de ses parents depuis 1370 jours

Guy Senbel.   

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LA MATSA DE LA LIBERTE

Notre famille compte parmi celles qui ont réussi à franchir le Rideau de Fer, en 1946, en passant par la ville frontière de Lvov, sur la frontière de la Pologne et de l’Union Soviétique. En attendant le train qui devait nous faire quitter cet enfer communiste, nous nous étions éparpillés dans plusieurs maisons afin de ne pas éveiller les soupçons de la police. Mais un soir, lors d’un contrôle, mon frère Meïr fut arrêté pour avoir passé la nuit dans une ville où il n’était pas recensé. Alors que nous avions, D.ieu merci, rejoint le convoi de la liberté, il fut détenu pendant un an dans la tristement célèbre prison Zlotchov.
Au bout d’un an, il fut libéré et, bien sûr, il tenta à nouveau de passer la frontière. Il se procura des faux papiers et se rendit à Tchernovitch où il se lia d’amitié avec deux autres jeunes ‘Hassidim. Ensemble ils réussirent à sortir de Russie et se retrouvèrent en Roumanie.
Là aussi ils durent se cacher et dormir dans des étables ou même à la belle étoile. Enfin ils arrivèrent non loin de la ville de Ratsots. Maintenant ils n’avaient plus qu’une étape à franchir, au milieu de la nuit.
Le passeur qui devait les accompagner arriva à l’heure dite mais il n’était pas seul: il avait emmené avec lui un escadron de policiers qui, bien entendu, arrêta le groupe de ‘Hassidim et le ramena en Russie où, après un simulacre de procès, ils furent condamnés à mort pour “trahison envers la merveilleuse mère-patrie”.
Cependant, à cette époque justement, le gouvernement soviétique tentait une opération de séduction vis-à-vis du monde occidental et, dans sa générosité, commua la sentence de mort en peine de vingt-cinq ans de prison suivis de cinq ans de “redressement” dans un camp de travail.
Les trois jeunes gens passèrent donc les deux premières années dans la prison de Korlog dont le seul nom fait encore frémir les survivants. Puis ils furent envoyés en Sibérie, dans le camp de Amasksiblog où la température moyenne était de quarante degrés en dessous de zéro. Là, les gens mouraient comme des mouches à cause du froid, de la faim et des maladies. La famine était telle que si un chien errant s’aventurait dans le camp, il était dévoré par les détenus.
Durant toutes ces années, nous étions sans nouvelles de notre frère. Où était-il ? Comment se portait-il ? Etait-il même encore vivant ?
Pessa’h 1952, lors d’une réunion ‘hassidique, je m’approchai du Rabbi et lui demandai une bénédiction pour mon frère. Le Rabbi me regarda, brisa un morceau de la Matsa qui se trouvait sur sa table et me le tendit: “A envoyer au frère”, dit-il.
Bouleversé, je ne réussis pas à faire sortir un mot de ma bouche. Après quelques instants, j’essayai de comprendre: nous n’avions aucune adresse à laquelle envoyer ce morceau de Matsa (ou quoi que ce soit d’autre, d’ailleurs !)
Je m’approchai encore une fois du Rabbi et lui demandai une explication: “Ce que j’ai voulu dire, dit-il, c’est que tu devras lui transmettre ce morceau de Matsa quand il aura réussi à sortir d’Union Soviétique”.
Bien que les paroles du Rabbi fussent encore empreintes de mystère, il est impossible de décrire leur impact positif sur notre famille. De fait, le Rabbi nous avait pour ainsi dire promis que Meïr était en vie et qu’il réussirait à quitter ce pays !
Les années passèrent et nous n’avions toujours aucun signe de vie de Meïr. Je gardai soigneusement le morceau de Matsa que m’avait confié le Rabbi, comme s’il s’était agi d’un trésor inestimable.
Un jour, j’entrai en audience privée chez le Rabbi et déclarai: “Rabbi, je vous demande une promesse plus explicite pour que nous puissions revoir notre frère vivant”.
Le visage du Rabbi devint très sérieux, il me regarda fixement et dit: “Pourquoi essaies-tu de me faire dire ce que je ne peux dire ? Mon beau-père (le Rabbi précédent - ndt) a affronté des épreuves bien plus difficiles et les a surmontées. Il est évident qu’il surmontera celle-là aussi ! ”
Tandis qu’il prononçait ses derniers mots, le Rabbi… pleurait !
Très peu de temps après, en 1955, mon frère fut libéré de façon tout à fait inattendue. Quand nous avons appris cette nouvelle, c’était comme si un grand poids nous avait été enlevé. Maintenant nous attendions avec impatience qu’il puisse sortir d’Union Soviétique: nous étions convaincus que cela se produirait, mais quand ?
Meïr se maria en Russie, sa maison était un foyer ‘hassidique exemplaire.
En 1971, mon frère et sa famille reçurent enfin la permission de sortir. Ils se rendirent d’abord aux Etats-Unis puis s’installèrent au Canada. La première fois que j’ai retrouvé Meïr, j’ai sorti de ma poche en tremblant de joie, le petit morceau de Matsa que le Rabbi m’avait chargé de lui donner: “Voici ta Matsa, lui dis-je, bouleversé, prends-la ! Elle a attendu ta libération pendant dix-neuf ans ! ”

Rav Berel Junik
traduit par Feiga Lubecki