Les rafles françaises
"La Rafle" fait partie de ces films importants qu’il faut voir et dont les douloureux enseignements sont à partager. "La Rafle" parle d’une histoire de la France qui n’est pas simple à transmettre, parce que c’est une histoire où la honte a longtemps joué le premier rôle. Réalisé par une femme qui n’est pas juive, qui fut longtemps journaliste d’investigation, ce drame réaliste restitue une atmosphère insoutenable, un passé encombrant pour l’histoire française, le pire de ce qu’ont connu les Juifs au cours de leur histoire, le pire de ce qu’a pu faire la France au cours de son histoire.
"La rafle" est une histoire lâche… Les arrestations sont basées sur l’effet de surprise afin d’empêcher que les Juifs puissent s’organiser pour y échapper. Au cours de la Seconde guerre mondiale, ces arrestations massives de personnes ont constitué une étape importante dans le processus d’extermination, au service de la "Solution finale" décidée par les Allemands et réalisée grâce à la complicité de nombreux gouvernements et peuples d’Europe, dont la France.
Les rafles servaient à remplir les wagons des trains de la mort, ces convois de déportation qui roulaient vers les camps dont l’on ne revenait pas. En France, les rafles conduisirent d’abord dans les camps de transit que furent Drancy, principal lieu de départ pour les "camps de l’Est", mais aussi Pithiviers, Beaune-la-Rolande, Compiègne, Angers, mais aussi Vittel, Aurigny, Mazures, Dannes-Corniers, Fort Mahon, Peuplingues, Coudette, des camps de travail qui devinrent des camps de transit, en attendant la déportation.
Après le statut des Juifs voulu par Vichy, les interdits professionnels et l’aryanisation économique, après la mise à l’écart de la communauté nationale, les rafles annonçaient l’extermination, la disparition physique d’hommes, de femmes, d’enfants de tous âges, qui avaient en commun d’être juifs.
La rafle du vélodrome d’hiver, dite "Rafle du Vel d’Hiv" est devenue "la" rafle, mais si elle fut certainement la mieux organisée, la plus importante par le nombre de juifs arrêtés puis déportés, de policiers et gendarmes impliqués, il faut se souvenir que les rafles en France n’ont pas commencé en 1942, mais dès 1941.
La première rafle date du 14 mai. Elle frappe à Paris les juifs polonais, tchécoslovaques et autrichiens. La préfecture de police distribue 6500 convocations pour "vérification"… Cette première grande opération est menée grâce à l’utilisation du fichier juif de la Préfecture, communiqué aux Allemands.
La deuxième rafle a lieu à Paris du 20 au 23 août 1941. La police municipale est chargée de procéder à la rafle de 4232 personnes qui seront internées à Drancy, avant d’être déportées à Auschwitz.
La troisième rafle date du 12 décembre 1941. 743 hommes, de nationalité française, furent arrêtés, ainsi que 300 juifs étrangers. Il fallait atteindre le chiffre de 1000 personnes, pour constituer un convoi de déportation selon les "normes" allemandes… Avant d’être déportés à Auschwitz en mars 1942, ils seront internés à Compiègne.
De décembre 1941 à juillet 1942, les rafles sont interrompues, principalement parce que les Allemands manquent de trains pour assurer la déportation vers l’Est de l’Europe. Surtout, depuis le 16 avril 42, Pierre Laval est revenu aux affaires et René Bousquet, un fidèle, accède aux fonctions de secrétaire général de la Police. Eichmann demande que 100 000 Juifs de France soient déportés à Auschwitz. Pour essayer d’atteindre ce chiffre, Bousquet propose aux Allemands la déportation des familles juives de la zone non occupée, et d’y intégrer les enfants de moins de 16 ans.
La rafle, d’abord prévue les 13 et 14 juillet, est reportée au 16, pour éviter qu’elle ne coïncide avec le jour de la fête nationale… Aucun allemand ne participe directement aux opérations. La rafle du Vélodrome d’hiver mobilisa 9000 gendarmes et policiers qui arrêtèrent 13152 juifs. Cette rafle ouvrit les chasses aux hommes, aux femmes, aux enfants juifs en zone libre qui furent organisées avec la même minutie qu’au nord de la ligne de démarcation au cours des deux années noires qui précédèrent la libération de la France.
Sans la collaboration du régime de Vichy, les Allemands n’auraient pas pu déporter autant de Juifs. Jacques Chirac l’a dit en 1995, pour toujours et magistralement, "Ces heures noires souillent à jamais notre histoire, et sont une injure à notre passé et à nos traditions. Oui, la folie criminelle de l'occupant a été secondée par des Français, par l'État français".
Ni manichéen, ni tire-larmes, "La Rafle" de Roselyne Bosch est le film authentique d’une histoire vraie. Le talent et la sincérité de ses acteurs rendent plus cruelle encore l’absence des disparus. Aujourd’hui, et pour toujours, ils manquent à la France.
Ce soir, nos pensées vont vers Guilad Shalit, otage du Hamas, soldat de Tsahal et citoyen français, privé de l'amour de ses parents depuis 1356 jours
Guy Senbel.
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