ALLOCUTION DU 8 MAI 2022
de Jacques Myard
Maire de Maisons-Laffitte
Membre Honoraire du Parlement
« Officiers, sous-officiers, caporaux et soldats de la Première Armée française. Le jour de la Victoire est arrivé.
A Berlin, j’ai la fierté de signer au nom de la France, en votre nom, l’acte solennel de la capitulation de l’Allemagne.
Dignes de la confiance de notre chef suprême, le Général de Gaulle, libérateur de notre pays, vous avez, par vos efforts, votre ferveur, votre héroïsme, rendu à la Patrie son rang et sa grandeur...
Soldats vainqueurs, vos enfants apprendront la nouvelle épopée que vous doit la Patrie. »
Berlin le 9 mai Général d’Armée de Lattre de Tassigny, commandant en chef de la 1ère armée française.
La Seconde Guerre mondiale embrasa la planète, 61 Nations sont entrées en conflit, elle fit 60 millions de morts militaires et civils.
« Des guerres plus que civiles, l’apparence du Droit donnée au crime lui-même, le crime se revêtant du Droit, toutes les forces mélangées du Monde s’affrontent dans un commun désastre. »
Cette phrase de Lucain dans La Pharsale était prémonitoire !
Elle illustre avec force les propos cyniques d’Adolph Hitler à ses généraux le 22 août 1939 :
« Fermez vos cœurs à la pitié. Agissez brutalement... Le plus fort a raison. »
Juin 1940 la France est à genoux.
Le 17 juin Philippe Pétain s’adresse aux Français « C’est le cœur serré que je vous dis aujourd’hui qu’il faut cesser le combat (...) »
Le 18 juin une voix alors inconnue mais ferme s’exprime à la BBC et appelle au combat :
« La France n’est pas seule.... Elle peut faire bloc avec l’empire britannique qui tient la mer et continue la lutte... Quoi qu’il arrive la flamme de la résistance française ne doit pas s’éteindre et ne s’éteindra pas. » Charles de Gaulle
Oui, la lutte continue pendant 6 années
- Avec la bataille d’Angleterre où les glorieux aviateurs de la Royal Air Force nuits et jours pendant des mois brisent les prétentions de la Luftwaffe de Goering.
N’oublions pas que près de 150 pilotes polonais et une quinzaine de pilotes français combattirent dans les rangs de la RAF heureusement équipés de radar.
- « Never in the field of human conflict was so much owed by so many to so few. » Winston Churchill
« Jamais dans l’histoire des conflits des hommes tant de gens n’ont dû autant à si peu. »
Ils n’étaient pas plus nombreux que les Spartiates aux Thermopyles, nous leur devons notre liberté.
Ils savaient que leur bataille portait le destin des démocraties, alors qu’en France occupée les traîtres et collaborateurs s’activent.
Herold Paquis, la voix de l’Allemagne à Radio Paris, répète tous les jours :
« Et tout comme Carthage, l’Angleterre sera détruite. »
Il sera fusillé à la Libération.
Charles de Gaulle l’avait prédit, cette guerre est une guerre mondiale :
« La France n’est pas seule. »
Mars 1941 les Américains votent le prêt bail pour armer l’Angleterre.
Le 22 juin 1941 Hitler attaque l’URSS, c’est l’opération Barbarossa au nom du Lebensraum.
Après leurs entretiens à bord du navire Augusta au large de Terre-Neuve, Churchill et Roosevelt signent le 14 août 1941 la Charte de l’Atlantique qui préfigure la future Charte des Nations Unies.
L’attaque japonaise sur Pearl Harbor le 7 décembre 1941 précipite l’entrée en guerre des Etats-Unis contre les puissances de l’Axe.
Le Deutsches Afrikakorps sous le commandement de Rommel essaie d’accéder aux champs pétrolifères du Moyen-Orient en faisant sauter le verrou de l’Egypte aux mains des Anglais.
A Bir-Hakeim du 26 mai au 11 juin 1942 la résistance de la 1ère brigade française libre sous le commandement du Général Koenig marque avec force le retour de la France combattante dans la guerre.
Il est même rapporté que Hitler aurait souligné la valeur des soldats français après..., il est vrai, après celle des soldats allemands.
De Gaulle déclare
« La Nation a tressailli de fierté en apprenant ce qu’ont fait ses soldats à Bir-Hakeim.
Braves et purs enfants de France qui viennent d’écrire, avec leur sang, une de plus belles pages de gloire.
La Nation écrasée, trahie, souffletée se rassemble dans la volonté de vaincre... » 11 juin 1942.
Ses forces bloquées par la résistance des Français à Bir-Hakeim, Rommel est alors battu par Montgomery à El Alamein en novembre 1942.
Sur le front russe de juillet 1942 à février 1943 :
« Stalingrad fut cette ville de la Seconde Guerre mondiale qui concentra toute la pensée du genre humain. » nous dit Vassili Grossman.
En, Ukraine les collaborateurs organisent la chasse aux juifs avec les Sonderkommandos. A l’avancée de l’armée rouge, Vassili Grossman découvre avec horreur que ce sont ses compatriotes qui ont massacré sa mère et ses compatriotes juifs.
Du 5 juillet au 23 août 1943 les chars de la Wehrmacht affrontent les chars soviétiques à Koursk. C’est l’opération citadelle de la Wehrmacht sous le commandement de Von Manstein.
Les Russes ont largement miné le terrain, mais surtout grâce aux renseignements britanniques, ils sont informés de l’attaque allemande.
Avec le soutien de l’escadrille de chasse Normandie-Niemen qui perd dans la bataille 11 pilotes dont le commandant Tulasne, abattu le 17 juillet 1943, les Russes remportent une victoire décisive sur la Wehrmacht.
La victoire des alliés se rapproche mais les tensions franco-américaines ne sont pas pour autant apaisées...
« Comment voulez-vous que je fasse avec un homme qui se prend à la fois pour Jeanne d’Arc et Napoléon ! » dit Franklin Roosevelt sur de Gaulle
Le 6 juin 1944 face à une armée allemande affaiblie après ses défaites en URSS, les Américains, les Anglais et Canadiens débarquent sur les plages de Normandie.
Le commando Kieffer, 177 hommes français libres, tous fusiliers marins, est parachuté avec l’armée britannique.
« La bataille de France est engagée, c’est la bataille de la France » proclame le Général de Gaulle.
Le 25 août 1945 la 2ème DB du Général Leclerc entre dans Paris, le même jour le Général de Gaulle arrive en voiture à la gare Montparnasse, après un passage au ministère de la guerre, il se rend à l’Hôtel de Ville.
« Pourquoi voulez-vous que nous dissimulions l’émotion qui nous étreint tous, hommes et femmes qui sommes ici chez nous, dans Paris debout pour se libérer et qui a su le faire de ses mains.
Non ! Nous ne dissimulerons pas cette émotion profonde et sacrée. Il y a là des minutes qui dépassent chacune de nos pauvres vies.
Paris ! Paris outragé ! Paris brisé ! Paris martyrisé ! Mais Paris libéré ! »
Paris est libéré, mais l’Allemagne nazie n’a pas encore capitulé, il a fallu repousser la contre-offensive de Von Rundstedt dans les Ardennes, réduire la poche de Colmar, libéré le 8 février 1945, avant de franchir le Rhin le 7 mars 1945 avec la prise du pont de Remagen, et de poursuivre jusqu’à Berchtesgaden, la 2ème DB y pénètre le 4 mai et hisse le drapeau français sur le nid d’aigle d’Hitler.
La 2ème DB du Général Leclerc.
Une « division de fer.
Toujours en avant.
Les gars de Leclerc
passent en chantant. »
L’Histoire est sans fin.
L’Histoire n’est jamais un long fleuve tranquille, sauf pour les naïfs ; William Shakespeare dit de l’Histoire qu’elle est « contée par un idiot, plein de bruit et de fureur qui ne signifie rien. »
L’Histoire est et sera toujours tragique
« La Paix, nous dit Giraudoux, est l’intervalle entre deux guerres »
Jean Giraudoux, Amphitryon 38
La guerre est de retour en Europe.
Depuis la chute du mur de Berlin. La France n’a eu de cesse d’empocher les dividendes de la Paix.
Elle a réduit la taille de son armée : l’armée dans toutes ses composantes est devenue une variable d’ajustement budgétaire.
C’est une faute sans appel !
Depuis des temps immémoriaux la devise latine « Si vis pacem para bellum » demeure le fondement de l’Humanité et des relations internationales.
Toute Nation désarmée est une Nation méprisée ;
Même si depuis la fin du XXème siècle entre grandes puissances « L’atome rend sage » dit le Général Gallois, les guerres asymétriques n’ont pas cessé.
Oui l’atome entre les grandes puissances rend sage, si les Hommes épousent la Raison et ne pactisent pas avec des idéologies mortifères et apocalyptiques.
« L’Histoire de l’Humanité est jonchée de cultures mortes, parfois même évanouies de la mémoire des vivants »
Raymond Aron fait ainsi écho à Paul Valéry
« Nous autres civilisations savons que nous sommes mortelles. »
L’Histoire toujours tragique repasse-t-elle les plats ?
Peut-elle nous tromper, nous piéger ?
Peut-elle nous attirer dans des situations que nous récusons ?
Peut-elle nous conduire dans des chemins que nous ne voulons pas emprunter ?
Le propre d’un gouvernement est de garder la tête froide, de savoir faire face en toute lucidité !
La France est reconnue pour tenir ses engagements internationaux, pour être une alliée crédible !
Mais alliée ne peut pas signifier vassalité.
Depuis Virgile nous savons : « Jamais de confiance dans l’alliance avec un Puissant ! »
En d’autres termes la France doit plus que jamais cultiver, fortifier son indépendance.
S’en donner les moyens militaires et diplomatiques.
Il n’y a pas de puissance sans forces armées crédibles, sans un service diplomatique de professionnels aguerris qui informe le gouvernement.
Le soldat et le diplomate vont et iront toujours ensemble.
La maîtrise de l’instabilité structurelle, permanente des relations internationales ne peut pas laisser place à l’émotion attisée par le moulin médiatique qui règne en maître aujourd’hui.
Tendons la main sans hésiter aux réfugiés qui fuient la guerre, c’est là et ce sera toujours l’honneur de la France.
Mais gardons raison et lucidité pour ne pas tomber dans la logique de guerre.
Ayons en mémoire, pour le repousser, le jeu dévastateur et tragique du mécanisme des engrenages des alliances qui peuvent nous entraîner dans des conflits toujours plus dévastateurs bien au-delà de notre volonté initiale.
« Un arrangement médiocre ou une Paix boiteuse vaut mieux que la guerre » nous rappelle Georges Clemenceau
Gloire et Honneur aux preux tombés au champ d’honneur.
Vive la liberté de toutes les Nations d’Europe !
Vive la République !
Vive la France !
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