Interview de Gil Taïeb
« Les autres candidats ne jouissent pas de la même notoriété que moi sur le terrain »
Par Avraham Azoulay
Nous continuons à vous présenter les candidats pour les élections au poste de député représentant les Français d'Israël.
Cette semaine, nous vous invitons à découvrir ou re-découvrir Gil Taïeb. Cet homme, marié et père de trois enfants, s'illustre dans la vie associative.
Il y a 20 ans, il fonde l'Association de Soutien à Israël (ASI) qui œuvre dans le domaine social, en collaboration avec plus de cinquante villes israéliennes et des acteurs politiques, associatifs, culturels et sociaux du pays (opération lunettes, opération cartable, etc.). Il est le président fondateur de l'Association pour le Bien-être du Soldat Israélien (ABSI Keren Or). Très impliqué également dans l’Alyah des Juifs de France, il est le co-fondateur de l’A M I dirigé par Avi Zana.
Il compte parmi les initiateurs et organisateurs de grands événements communautaires tels que : les 12 heures de l'Amitié France Israël, la manifestation pour la libération de Guilad Shalit place du Trocadéro et bien d’autres manifestations de solidarité avec Israël.
Nous l'avons rencontré à l'occasion de son récent passage en Israël. Il nous a expliqué ses motivations et sa vision de ce poste inédit de député.
Le P'tit Hebdo : Pourquoi avoir choisi de briguer ce poste de député ?
Gilles Taïeb : Ce n'est pas le titre qui m'intéresse mais pouvoir poursuivre mon engagement citoyen et mon action menée en Israël depuis 20 ans.
J'ai, par le passé, souvent été sollicité par mon entourage, pour me lancer en politique. Jusqu'à ce jour, j'ai toujours refusé.
Si j'ai décidé de me lancer cette fois, c'est parce que ces élections représentent une opportunité unique. La circonscription dans laquelle je me présente possède une spécificité particulière. Il s'agit pour moi de continuer à défendre Israël mais aussi les droits des expatriés français.
Lph : Êtes-vous entouré par une équipe israélienne pour ces élections françaises ?
G.T : Vous savez, je suis ancré dans la société israélienne par le biais de toutes les actions que j'ai menées ici et depuis la France.
Pour ces élections, il m'a paru indispensable de constituer une équipe sur place, qui vit la réalité du terrain. Comment défendre correctement les intérêts des francophones d'Israël sans prendre les informations à la source ?
Lph : Qui sont ces Israéliens qui vous soutiennent ?
G.T : Tout d'abord, j'ai choisi comme suppléant Avi Zana, directeur général de AMI qui aide depuis des années les olim hadashim dans leurs démarches et leur intégration. Il sera en relation avec l'ensemble du tissu associatif israélien et je serai son bras actif auprès des autorités françaises.
Par ailleurs, 18 maires de villes israéliennes (Kyriat Shmona, Safed, Maalot, Hazor, Haïfa, Sdérot, Eilat, Ashdod,...) appartiennent à mon comité de soutien ainsi que des personnalités de l'armée israélienne – soldats et officiers.
De nombreux présidents d'associations locales avec lesquels je travaille m'ont également assuré de leur soutien dont celui de l'association des maires d'Israël.
Parmi les personnes connues de la communauté francophone qui se sont engagées en ma faveur, je citerai, à titre d'exemple : Emmanuel Adda, Judith Bonan, Haïm Messika, Sydney Arrous et J.C Benhamou (Ashdod), Jacques Detoledo, Marc Haviv, Charles Cohen (juriste, très actif dans la défense des droits pour les retraités), ou encore Eric Bellaïche et Chalom Wach. La liste n'est évidemment pas exhaustive et s'allonge de jour en jour.
Lph : Si vous êtes élu, vous passerez d'acteur communautaire, associatif à un rôle politique. Comment passe-t-on d'un monde à l'autre ?
G.T : Il ne s'agit pas de cela, mais plutôt d'un passage de l'ombre à la lumière. Les deux mondes, associatif et politique, ne sont pas cloisonnés. En effet, en tant que président d'associations, je suis en contact indirect permanent avec les autorités françaises. De plus, je côtoie de près les sphères politiques puisque mon épouse est une élue parisienne [NDLR : élue chevènementiste, apparentée au Parti Socialiste au Conseil de Paris].
Toutes les opérations ou manifestations que j'ai organisées ont nécessité une collaboration avec les milieux politiques.
En fait le politique est au service du social, ils sont intrinsèquement liés. Faire du social n'est pas être déconnecté du politique, au contraire.
Lph : A ce jour, quatre candidats se sont déclarés pour notre circonscription. Vos idées et votre indépendance par rapport aux partis politiques traditionnels vous distinguent des deux candidates féminines. Cependant, il est plus difficile de comprendre en quoi votre candidature se différencie-t-elle de celle de Philippe Karsenty.
G.T : En premier lieu, je tiens à préciser que je ne me construis pas aux dépens des autres. Je respecte tous les candidats et leurs positions.
Je pense avoir une légitimité prononcée. En effet, j'ai à mon actif 20 ans de réalisations en faveur d'Israël, des réalisations concrètes, à l'aide de personnes sur place.
Les autres candidats ne jouissent pas de la même notoriété que moi sur le terrain.
Lph : Philippe Karsenty a tout de même acquis un public ici en se battant seul contre des Grands dans l'affaire Al-Dura.
G.T : J'ai toujours soutenu et je continue à soutenir Philippe Karsenty dans don combat. Il s'agit d'une lutte très honorable et d'une cause noble.
Cependant, force est de constater que ce combat est son seul combat. Qu'a-t-il réalisé d'autre ? Quel autre contact a-t-il créé avec la réalité israélienne ?
Pour ma part, je m'inscris dans une action générale, un ensemble. Je suis actif dans toutes les villes du pays auprès des soldats, des étudiants, de toute la population. Le travail que j'ai effectué correspond à l'éventail de sujets et de domaines qu'un député doit connaître.
Lph : Lors de la séance du 21 juin au Conseil de Paris, un vœu a été présenté par les Verts et les Communistes concernant la reconnaissance d'un Etat palestinien. Un autre vœu a été soumis par Valérie Hoffenberg (UMP, votre concurrente pour l'élection de 2012) afin de condamner l'opération de la flottille vers Gaza. Dans ce conseil, siège également Karen Taieb, votre épouse, membre du Parti socialiste.
Cette dernière a voté contre son groupe lors de ces deux scrutins mais Valérie Hoffenberg a déploré, sur les ondes de RCJ, qu'elle n'ait pas « utilisée [son] influence au sein du Parti socialiste afin que celui-ci soutienne [la proposition de l'UMP] ». En d'autres termes, elle reproche à votre épouse de ne pas avoir affiché ses positions oralement.
Suite à cela, vous avez jugé utile de faire une mise au point vis-à-vis de Valérie Hoffenberg. Pourquoi ?
G.T : En votant contre le groupe auquel elle est apparentée, mon épouse a montré son courage et sa fidélité sans compromis à Israël.
J'ai donc réagi en dénonçant cette attaque qui cherchait sournoisement à nuire à ma probité.
Mon épouse et moi avons condamné ce mensonge politicien et pour nous l'incident est clos mais nous restons vigilants.
Je ne laisserai aucun candidat utiliser le mensonge ou la diffamation.
Lph : Si vous êtes élu, vous serez « le Juif sioniste » de l'assemblée nationale. N'avez-vous pas peur d'un combat perdu d'avance ?
G.T : Je ne le crois pas. Il n'est jamais inutile de parler.
Ces élections sont importantes car elles feront passer un message fort si c'est un fervent défenseur d'Israël qui est élu.
Par ailleurs, je possède et je l'ai prouvé, une forte capacité mobilisatrice. Je suis en mesure d'activer tout un réseau d'influence pour permettre aux voix isolées du Parlement français de se faire entendre. Il existe de nombreux députés qui ne suivent pas la pensée majoritaire, il s'agit de leur donner la parole. Je pense que ces élections pourront libérer cette parole.
En tout cas, je serai sans complaisance, je ne chercherai à plaire à personne si ce n'est à mes électeurs, dont je défendrai les intérêts !
Lph : Quelles sont vos trois priorités ?
G.T : Si je suis élu, je m'attacherai à garantir à mes électeurs tous leurs droits. Je me battrai pour qu'ils soient considérés comme des citoyens à part entière. Il faut savoir qu'à l'heure actuelle, les citoyens français d'Israël ne bénéficient pas du même traitement que ceux qui résident en France. Cette situation ne doit pas perdurer.
Ma deuxième priorité sera d'œuvrer à l'intérieur des structures dirigeantes françaises pour défendre Israël.
Et enfin, je souhaite par ce biais, offrir un tremplin en Israël aux membres de l'équipe qui me soutient.
Ces élections sont l'occasion pour les Français d'Israël de faire comprendre qu'ils sont une force. Et ce message s'adressera autant aux autorités françaises qu'à celles d’Israël.
Lph : On vous voit en photo avec certaines personnalités israéliennes comme Shaoul Mofaz ou Gabi Ashkenazi qui sont plus ou moins affiliés au parti Kadima. Vous sentez-vous proche de ce parti ?
G.T : Ces personnes, je les ai connues avant qu'elles n'entrent en politique, dans le cadre de leurs fonctions militaires.
Je ne suis proche d'aucun parti en Israël, seulement de personnalités. D'ailleurs, mon comité de campagne comprend des députés du Likoud comme des membres de Shass et de tous les partis avec lesquels nous travaillons sur le terrain.
Mes positions sont claires par rapport au pays : Jérusalem est incontestablement la capitale d'Israël, nous devons fixer des frontières sûres et défendables.
La terre d'Israël est la terre des hommes avec la bénédiction de D'ieu.
Lph : Le P'tit Hebdo organise après les fêtes de Tichri « Le grand débat ». Tous les candidats pour ces élections seront conviés. Répondrez-vous présent ?
G.T : Je ne refuserai évidemment pas de participer.
Mais, je pense que dans l'immédiat, il ne s'agit pas de la priorité. La 8e circonscription à laquelle appartient Israël, est également constituée des Français de Grèce, de Turquie ou d'Italie. Si l'on veut que la voix d'Israël soit entendue, il faut une forte mobilisation des francophones de ce pays.
Autrement dit, je souhaite rappeler que l'urgence numéro 1 est d'encourager tous les Français d'Israël à s'inscrire au consulat de France pour pouvoir aller voter.
Les inscriptions sur les listes électorales se terminent le 31 décembre 2011. Pour moi, avant cette date, nous devons concentrer nos efforts sur la mobilisation. En effet, si les franco- israéliens ne sont pas assez nombreux, ils ne pèseront rien face aux autres pays. Le vote israélien n'aura pas de valeur, ce serait dommage.
Si l'on veut vraiment agir maintenant, c'est en encourageant les inscriptions sur les listes électorales. Ensuite, viendra le temps du débat !
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