BILLET ÉCONOMIQUE À CONTRE-COURANT DES TABOUS IDEOLOGIQUES
de Jacques MYARD
Membre Honoraire du Parlement
Maire de Maisons-Laffitte
Président du Cercle Nation et République
Le 6 DECEMBRE 2018
Les icônes, les certitudes économiques ont parfois la vie dure mais elles finissent toujours par succomber lorsqu' elles sont déconnectées des réalités et ne correspondent plus qu'à des choix idéologiques parfaitement contestables.
On vient d'en avoir la preuve avec le revirement étonnant de Philippe Aghion économiste de renom, inspirateur d'Emmanuel Macron qui, dans un article récent, propose "une sortie provisoire de la contrainte européenne des 3% de déficit budgétaire" . Cela ne manque pas de sel car c'est une invitation au Président de la République à manger son chapeau, à renoncer à ses illusions eurobéates pour mettre en oeuvre une politique à l'opposé des dogmes de l'Union européenne.
Philippe Aghion prend ainsi conscience de la réalité mais bien tard !
La réalité est simple: l'obsession des 3% qui est un objectif discutable même en période de croissance devient un facteur de récession lorsque la croissance stagne et décline; il convient d'agir de manière contra-cyclique.
La politique économique et fiscale de l'actuel gouvernement est une suite de contradictions à peine croyable :
. Supprimer l'ISF pour partie mais annoncer "en même temps" la réduction des APL témoigne d'une faute politique peu commune ; il faut y ajouter, pour compenser la perte des APL dans les logements sociaux, l'injonction du gouvernement adressée aux bailleurs sociaux de baisser les loyers, ce qui les place dans des difficultés financières.
. Se faire élire sur une proposition démagogique, la suppression de la taxe d'habitation ( TH ), sans étude d'impact, sans savoir comment seront compensées les ressources des collectivités est tout simplement une escroquerie qui aboutit à la hausse des carburants et la révolte populaire.
. Instituer la CSG pour quasiment tous les retraités, les professions libérales est une ponction directe sur la consommation et un frein à la reprise économique.
. Réduire en même temps les investissements dans le budget de l'Etat par la politique du rabot budgétaire n'est pas de nature à relancer la croissance. Selon le " jaune " annexé au projet de loi de finances pour 2019 sur l'évaluation des grands projets d'investissements publics, les investissements de l'Etat sont de 15,11 milliards d'euros auxquels on peut ajouter environ 4 milliards pour les administrations de sécurité sociale, soit au total 20 milliards € environ. Ce montant représente 2,7 % des budgets publics, Etat et Sécurité sociale, dont le montant s'élève à 733 milliards d'euros, ou 4,6 % du seul budget de l'Etat.
En conséquence, la hausse des impôts et taxes sur la consommation, la faiblesse des investissements ne peuvent pas relancer la croissance, bien au contraire !
Que faire ?
Il est évident que la relance exige une autre politique
. baisse des impôts et taxes pour conforter la consommation des ménages.
. Investir et encore investir.
Relevons que c'est la politique de D.Trump, une relance néo-keynésienne.
Comment financer ces baisses d'impôts et ces investissements ?
Dans le système actuel cela signifie plus de déficit, plus d'emprunts sur les marchés, l'accroissement de la dette.
Il y a une autre méthode possible : Philippe Aghion a franchi le Rubicon en écrivant qu'il fallait faire fi des 3% . Il faut aller plus loin et sortir des règles carcans européennes.
Un Etat n'est pas un investisseur privé qui doit emprunter sur les marchés comme un simple citoyen, il a une mission de service public.
L'interdiction pour un Etat d'être financé par des avances de la banque centrale a été solennellement entérinée par le traité de Maastricht; c'est une règle lourde de conséquences qui a placé les Etats sous le contrôle des banques et des marchés sous le jugement des agences de notation dont l'objectivité n'est pas une valeur sûre .
" Celui qui contrôle l'argent de la Nation contrôle la Nation "
Thomas Jefferson
Cette interdiction de recourir à des avances des banques centrales a engendré des dettes souveraines importantes qui fragilisent tout le système financier international. Ces avances seraient effectuées à taux zéro et, si la France avait poursuivi ce système, elle n'aurait pas de dette aujourd'hui.
Il est urgent de remettre en cause ce dogme idéologique et de permettre aux banques centrales de procéder à des avances au Trésor pour les investissements.
Ce sytème a permis la reconstruction de la France sous la IV eme République et a été poursuivi sous la V eme avec succès .
Alors, assez d'idéologie, on ne gouverne pas l'économie avec des carcans mais en sachant s'adapter aux réalités.
Bien évidemment, il est impératif de mettre en oeuvre des réformes de structure. Ces réformes seront d'autant plus acceptées que la reprise sera effective; André Bergeron ne parlait - il pas de " grain à moudre " pour justement compenser et faire admettre des réformes ?
Ne laissons pas, selon la formule de Jean-François Revel, " l'idéologie penser à notre place ". Reprenons la maîtrise de notre économie loin des tabous idéologiques et à courte vue.
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