Le principe de précaution ne doit pas être celui de l’incompréhension
Le principe de précaution est un candidat idéal au bucher, lorsque chacun constate tous les trois mois la faible compétitivité de la France. Passons sur le fait que ceux qui le pourfendent aujourd’hui n’y trouvaient rien à redire en 2005, lorsqu’il a été intégré à la Charte de l’Environnement, ce n’est pas le débat.
Essayons juste de comprendre pourquoi ce principe concentre tant d’attentions. Pourquoi il est brandi comme la source de tous les maux. Nous avons une relation ambigüe avec la notion de progrès. Et un rapport troublé avec la notion de risque. Le risque est moderne, il attire, mais derrière le risque vient la question de la responsabilité. Et là, tout à coup, plus personne.
Le principe de précaution vise à guider en eaux incertaines. A permettre l’éclosion de l’innovation scientifique, en faisant la part de l’incertitude. Et pour celle ci, lorsqu'on peut craindre un risque irréversible et grave pour l’environnement, il énonce pour l’autorité publique un devoir d’agir. Pas de bloquer, d’agir. Pour s’assurer que nous avançons collectivement en conscience. Scientifiquement, justement. Par des mesures provisoires et proportionnées.
Certains souhaitent le supprimer : je doute que cela nous rende tout à coup beaucoup plus courageux, innovants et compétitifs. D’autres veulent lui apposer un principe d’innovation, qui permettrait de construire un équilibre subtil. Je ne rejette pas cette proposition, mais j'en questionne le fondement. Parce qu’opposer principe d’innovation et principe de précaution, c’est précisément pour moi le signe qu’on ne comprend pas le second.
L’attaque récurrente et désormais quasi-unanime contre le principe de précaution est trop caricaturale pour qu’elle ne cache pas une certaine impuissance. Si certains pensent que la suppression d’un principe qui donne tout son sens opérationnel à la Charte de l’environnement va subitement nous mettre sur les rails d’une croissance des trente glorieuses, je ne peux pas les priver de ce dessein. Mais j’ai voté, comme la quasi-unanimité des parlementaires de droite en 2005, ce principe, et je m’y tiens.
NKM
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