Cette semaine, nous souhaiterions attirer l’attention de nos lecteurs sur la visite historique d’Angela Merkel en Israël. A quelques semaines des célébrations du 60ème anniversaire de la création de l’Etat juif, la chancelière allemande a souhaité témoigner de sa solidarité avec Israël, et de sa volonté de resserrer liens entre les deux pays. « Notre histoire aujourd'hui, empreinte de relations stables et amicales, fait partie des miracles de l’histoire » avait déclaré Angela Merkel avant son départ pour Israël.
Mardi 18 mars, Angela Merkel fut le premier chef d’Etat étranger à s’exprimer devant le Parlement israélien. Devant les députés de la Knesset, elle a parlé en hébreu et en allemand. La polémique suscitée par trois députés israéliens qui préférèrent ne pas entendre parler en allemand, n’aura pas gâché la réception d’un discours émouvant, sincère. De même, les reproches formulés par la presse israélienne selon lesquelles l’Allemagne « en fait trop » n’auront pas troublé la poursuite d’un programme de visite très chargé en symboles. Et en déclarations fortes, notamment sur l’Iran.
Courageuse et constructive, utile aussi pour un pays parfois seul face à une Europe qui souvent condamne, la visite d’Angela Merkel ne laisse pas indifférent. Angela Merkel est une Allemande d’Allemagne de l’Est, l’ex-RDA qui refusait de reconnaître sa responsabilité dans la Shoah. Angela Merkel est une Allemande en visite dans un pays qui a subi le massacre le plus terrible de tous les temps.
L’histoire des relations israélo-allemandes est complexe. L’Allemagne a massacré le peuple d’Israël en Europe. Et le processus de création d’un Etat juif a été accéléré après la Seconde guerre mondiale, parce que la politique nazie d’extermination a rendu plus urgente la décision de créer un Etat dans lequel les Juifs seraient libres et indépendants.
Et ne l’oublions pas, « l’Etat juif » de Theodore Herzl a été pensé et écrit en allemand. L’architecture de Tel Aviv, le Bauhaus, est une architecture allemande. Les Israéliens d’origine allemande ont souvent conservé leurs patronymes allemands, fierté d’une origine impossible. Les Juifs allemands étaient des patriotes ; ils aimaient une Allemagne, avant qu’elle ne les détruise.
C’est l’Allemagne qui a tué Israël, et c’est l’Allemagne qui a précipité sa renaissance. Le malaise est palpable, omniprésent.
Il y a le malaise allemand. La culpabilité allemande. La responsabilité de l’Allemagne, d’avoir fait disparaître presque tout un peuple. Angela Merkel rappelait justement cette semaine « l’éternelle responsabilité de l’Allemagne dans la catastrophe morale de l’histoire allemande que fut la Shoah ». En découle un devoir de solidarité des héritiers des bourreaux aux héritiers des victimes.
Et puis il y a un malaise israélien. Longtemps, l’image de l’Allemagne, en Israël, et au sein de la Diaspora également, a été associée à l’horreur des camps nazis. Menachem Begin, Premier ministre d’Israël et Prix Nobel de la Paix, rejetait toute relation avec l’Allemagne. Le Centre de l’Héritage qui porte aujourd’hui son nom, situé au cœur de Jérusalem, refuse les subventions ou toute forme de mécénat allemand.
Pourtant, l’Allemagne est aujourd’hui devenue le premier partenaire européen d’Israël. Les échanges commerciaux, culturels, scientifiques seront consolidés grâce à la mise en place de consultations intergouvernementales, comme celles qui existent entre la France et l’Allemagne par exemple, et qui symbolisent des liens étroits. Accompagnée de huit de ses ministres, Angela Merkel a été la première à coprésider avec Ehoud Olmert une réunion des deux gouvernements, une sorte de conseil des ministres commun.
Angela Merkel ne s’est pas déplacée dans les villes palestiniennes. Elle a simplement téléphoné au Président Mahmoud Abbas, qui remercie l’Allemagne d’accueillir au début du mois de juin prochain une conférence sur le Proche-Orient et l’aide aux Palestiniens.
En réservant un accueil chaleureux à Angela Merkel, Israël a montré sans doute sa volonté d’écrire une autre page avec l’Allemagne, afin de créer une nouvelle dynamique de coopération avec l’Europe.
C’est précisément ce type de coopération qui devrait permettre la libération des trois soldats israéliens retenus par le Hamas et le Hezbollah depuis 636 jours. Ce soir, nous pensons à Guilad Shalit, Ehoud Goldwasser et Eldad Reguev.
Chabbat Shalom,
A la semaine prochaine,
Guy Senbel
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